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Dossier EnBeauce.com

Quel avenir pour Saint-Alfred?

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1 février 2024
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Sylvio Morin
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Par Sylvio Morin, Chef des nouvelles

L'année 2024, qui vient à peine de commencer, s'annonce tout aussi tumultueuse à Saint-Alfred, que celle qui vient de se terminer.

La saga du «ponceau de la colère» (fermeture du rang 1) et la hausse phénoménale des taxes municipales, en particulier pour les contribuables branchés au réseau d'aqueduc et d'égout, ont contribué largement à alimenter la grogne en 2023, qui a été dirigée vers une seule et même personne: le maire Jean-Roch Veilleux. L'élu a été l'objet d'insultes et de méfaits au cours des derniers mois.

Une centaine de citoyens ont réclamé sa démission, lors d'une houleuse séance du conseil municipal, le 16 janvier. Un attroupement monstre pour cette petite localité, organisé  par Ensemble + fort St-Alfred.

« Ça stagne alors qu'il faudrait que ça bouge. Il y a un laisser-aller. Il (le maire Veilleux) n'est pas tourné vers l'avenir. On dirait que ça le dérange. Les informations sont bloquées à la municipalité. Et les chiffres qu'on reçoit sont contradictoires. Ça manque de transparence. Il y a des apparences de conflit d'intérêt. Faut faire quelque chose »,  a déclaré en entretien téléphonique avec EnBeauce.com, Marie-Josée Therrien, une des fondatrices de la formation citoyenne, qui a vu le jour cet automne. On retrouve aussi à la tête du groupe Chantale Couture et Jean-Pierre Veilleux, ce dernier étant incidemment le filleul du maire. Parmi les militants, le conseiller démissionnaire, Pascal Maheux, qui a quitté la table des élus en décembre, pour marquer son opposition à l'adoption du budget 2024.

Installée à Saint-Alfred depuis quatre ans, Mme Therrien estime que le développement économique doit être prioritaire, « sinon, les gens vont aller ailleurs que dans notre si beau village. » Elle évoque le refus de projets par la municipalité, citant en exemple la construction de 24 minis-maisons et l'installation de serres pour la culture du cannabis.

La porte-parole croit aussi que Saint-Alfred a mis ses citoyens « dans le trouble »  avec la hausse de la taxe foncière, dans le budget 2024, qui atteint environ 15% pour les «non-branchés», et entre 21% à 30 pour cent pour les résidences qui bénéficient du réseau d'eau et d'égout. « Ça affecte particulièrement les aînés », évalue-t-elle.

Lors de sa création, Ensemble + fort St-Alfred avait comme objectif de présenter des candidats aux élections municipales générales de 2025, mais la vacance de trois sièges de conseillers, au cours des dernières semaines, a changé la donne. La formation va présenter des postulants aux élections partielles du 24 mars prochain. « En ne s’impliquant pas, les résidents sont partiellement responsables de la situation actuelle. Nous, on va le faire (s'impliquer). On veut être là (à la table du conseil) plutôt que de chialer. De cette façon, on va pouvoir agir sur l'orientation de la municipalité », a signalé Mme Therrien. C'est elle-même et ses deux camarades du groupe qui feront le saut dans l'arène municipale.

Par ailleurs, le co-propriétaire du NRJ Spa Nordique, Rouan Bilodeau, qui a annoncé officiellement sa candidature à la complémentaire, lors de la séance du 16 janvier, ne fait pas partie de la coalition citoyenne et se présente comme indépendant, a indiqué la porte-parole.

Au moment d'écrire ces lignes, l'élection partielle permettra officiellement de combler les sièges No 1 et No 6. Pour le poste 3, devenu libre le 16 janvier en raison de l'absence, à trois séances de suite, de la titulaire Line Lachapelle, il faudra attendre la confirmation de la Commission municipale du Québec pour savoir si le siège pourra être comblé lors de la partielle de mars, ou à une date ultérieure.

Enfin, Ensemble + fort St-Alfred veut qu'une étude soit entreprise pour un «regroupement municipal», peut-être même une fusion avec ses voisines, Beauceville ou Saint-Victor. « On veut pas rejeter aucune alternative, mais les gens s'associent plus avec Saint-Victor », de faire remarquer la citoyenne alfredoise.

La proposition d'étude a été soumise à la séance du 16 janvier, mais elle a été rejetée. La résolution adoptée ce soir-là signale que ce point ne pourra revenir à l'ordre du jour que lorsque tous les sièges de la table du conseil municipal seront comblés.

Une réputation malmenée
Rencontré samedi par EnBeauce.com, le maire Jean-Roch Veilleux a indiqué qu'il en avait marre de la campagne de « désinformation et de harcèlement » qui se fait sur son dos, que plusieurs « prennent pour du cash » tout ce qui est rapporté à tort et à travers, « ce qui est en train de détruire ma réputation » alors que l'on attribue à sa seule personne la responsabilité des difficultés que traverse la municipalité. 

« Pour le ponceau du rang 1, c'est un effondrement qui est survenu, ce n'est pas la municipalité qui a provoqué l'événement! On a pas fermé l'endroit pour contrarier les résidents, on l'a fait pour des raisons de sécurité, parce que c'était notre premier devoir. J'aurais bien voulu que l'on puisse régler la question plus rapidement, mais on est pas tout seul là-dedans. Si on avait pas fermé le rang et qu'il était survenu un accident, on nous aurait blâmé d'être négligent. Si on s'était engagé dans la réfection du ponceau sans soutien de Québec, on aurait chialé que l'on endette Saint-Alfred », de fulminer le maire.

Quant au réseau d'aqueduc et d'égout, il a tenu à rappeler que les installations avaient été mises en place, il y a cinq ans, parce la majorité des puits artésiens des résidences, qui sont maintenant desservies, n'étaient plus en mesure de fournir une eau potable, le précieux liquide étant contaminé par l'évacuation des eaux usées de ces bâtiments qui se faisait via un égout pluvial non conforme aux pratiques environnementales. 

Le maire Veilleux a rappelé aussi que les travaux du réseau ont été réalisés sans dépassement des coûts de ce qui était prévu, soit une facture de 4,6 M$. Cependant, les frais d'entretien annuels de l'usine d'épuration des eaux et celle de filtration, sous-estimés au départ, n'ont cessé d'augmenter depuis, en raison de l'inflation. Il en va de même pour les taux d'intérêt. « Il faut renouveler cette année le règlement d'emprunt pour le réseau et il est certain que ce sera bien plus élevé qu'il y a cinq ans. Il fallait le prévoir dans le budget de cette année. C'est pour cette raison que l'on a dû augmenter la taxe foncière », d'ajouter le premier magistrat qui indique aussi que le quart du prêt pour le réseau est payé par l'ensemble des contribuables puisque les infrastructures qui s'y trouvent (rues, trottoirs, bureau et garage municipal, etc,) sont utilisées par tous les résidents.

Même s'il a été traité par certains habitants de «pire maire de l'histoire de Saint-Alfred», il estime, au contraire, que son bilan de réalisations est plutôt impressionnant depuis qu'il occupe la fonction, ce qui remonte à 2005. Il énumère entre autres, la récupération de plusieurs centaines de milliers de dollar dans le dossier du site de résidus de pneus, l'installation de la fibre optique «mur-à-mur», l'agrandissement du périmètre urbain, l'aménagement d'installations de loisirs, avec la patinoire et les jeux d'eau, la rénovation de l'édifice municipal, la construction du garage à sel pour la voirie, l'asphaltage de quatre kilomètres de la rue principale jusqu'à la jonction de la route 108, l'appui, en trois phases, pour le développement du site de villégiature permanente au Lac Sartigan et plus récemment, le soutien au projet Cultiver pour partager, qui transformera l'église du village en entrepôt régional de légumes frais. «Nommez-moi un seul élément ou projet que j'ai bloqué pour empêcher le développement de Saint-Alfred. Vous en trouverez pas! », lance-t-il, défiant.

Sous son règne, avance-t-il, la valeur foncière de Saint-Alfred est passée de 32 M$ à 69 M$.

Par ailleurs, Jean-Roch Veilleux est contre le fait que la municipalité s'engage, à l'heure actuelle, à entreprendre une étude de regroupement municipal, alors que les effectifs des élus sont à moitié dégarnis. « Il faut que tout le monde soit là pour décider ça. Ça touche l'avenir du village.»

S'il n'est pas chaud à l'idée de fusion, il se montre favorable à élargir la collaboration et les ententes inter-municipales, comme c'est le cas présentement avec Saint-Victor (service de sécurité incendie), Beauceville (borne sèche du Lac Sartigan) et Tring-Jonction (partage de personnel administratif).

Enfin, le maire a déjà annoncé qu'il ne se représenterait pas pour l'élection de 2025 mais qu'il avait l'intention de terminer son mandat. Il se pourrait qu'il ne se rende pas jusque-là puisqu'il vient de mettre sa fermette en vente. Parce que l'homme aura 82 ans au cours de l'été et qu'il n'a plus l'énergie d'entretenir sa terre de 52 acres, en plus des problèmes de santé de son épouse. Et sans surprise, une décision beaucoup motivée par le rejet et le manque de respect dont il se sent victime. « Même si plusieurs en doute, j'ai toujours eu à coeur le bien de la municipalité et de sa population. Quand ce sera vendu, je laisserai ma place», a-t-il dit.

Prudence victoroise
Joint cette semaine par EnBeauce.com pour commenter la situation de Saint-Alfred, le maire de Saint-Victor, Jonathan V. Bolduc, a indiqué qu'il n'avait pas eu d'entretien avec l'association Ensemble + fort St-Alfred sur un possible regroupement municipal.

Mais il a laissé savoir qu'au cours des derniers mois, en raison notamment de la fermeture du rang 1, dont une partie est en territoire victorois, il avait été contacté à plusieurs reprises par des citoyens de Saint-Alfred qui demandaient une plus grande collaboration entre les deux localités, certains même allant suggérer la fusion. « À ces gens, je leur ai dit de s'adresser à leur conseil. Chez-nous, les élus de Saint-Victor, on a une ligne directrice qui dit que l'on a intérêt à travailler avec nos voisins quand il y a des gains à faire, quand c'est gagnant-gagnant. On le fait déjà avec les pompiers [...] S'il y a moyen d'aller plus loin dans cette collaboration, tant que tout le monde est respecté et gagnant, on est intéressé », a confié le maire en entretien téléphonique.

L'idée lui plait qu'une étude exploratoire de regroupement soit entreprise. « Il faut voir comment optimiser les façons de faire pour le bénéfice de notre communauté. Moi, je suis ouvert à ça. Cependant, je veux être très prudent là-dessus, comme on est la plus grande municipalité, je ne veux pas donner l'impression que l'on veut faire de quoi malgré les autres décideurs, qui sont les élus de Saint-Alfred, S'ils nous disent qu'ils sont intéressés, logiquement on va aller de l'avant. Mais vous savez, un mariage, ça se fait à deux. Il faut pas qu'il n'y ait personne qui se sente forcé ou de tordage de bras », a-t-il dit, lui qui occupe en plus la charge de préfet de la MRC Beauce-Centre.

Le maire Bolduc a avoué qu'il y a quelques années, il a tendu la main à son homologue et voisin pour un plus grand partage des ressources entre les deux villages mais la proposition est restée lettre morte. « Il faut croire que le fruit était pas mûr, si je peux m'exprimer ainsi. Aujourd'hui, il faudra que ça vienne de Saint-Alfred. »

Diviser en deux par les lacs
L'idée de fusion ou de regroupement n'est pas nouvelle à Saint-Alfred. Déjà, en 2020, des résidents avaient acheminé une demande d'annexion à la Ville de Beauceville, pour une partie du territoire alfredois, qui comprenait notamment le Lac Sartigan, une portion du rang Saint-Guillaume et le quatre-chemins de la route Fortin.

À la suite de la demande, la Ville de Beauceville avait mandaté à l'époque un aménagiste pour mener une étude technique et une analyse de la proposition. En 2022, les élus de Beauceville avaient accepté que cette proposition soit soumise au ministère des Affaires municipales. Finalement, le projet d'annexion avait été complètement rejeté par les instances gouvernementales qui avaient estimé que les éléments en contentieux (entretien des chemins de gravier et demandes d'asphaltage des routes du secteur, entre autres) n'étaient pas valables pour justifier une telle démarche de redécoupage du territoire de Saint-Alfred.

En tête de cette demande à l'époque, on retrouvait le promoteur Rouan Bilodeau, le même qui aujourd'hui veut briguer les suffrages pour se faire élire au conseil municipal de Saint-Alfred, possiblement comme maire de la petite localité si l'occasion le nécessite et se présente éventuellement, avait-il confié à la sortie de la séance du 16 janvier.

Rejoint il y a quelques jours par EnBeauce.com, le maire de Beauceville, François Veilleux, a dit observer ce qui se passait ces temps-ci à Saint-Alfred et indiqué que son administration ne refuserait pas d'accueillir à nouveau une demande de regroupement partiel ou complet avec la localité voisine, si elle venait sur le tapis.

« La logique serait de diviser le territoire en deux, avec la partie entourant le Lac Sartigan s'intégrant à Beauceville et l'arrondissement du Lac Fortin s'en allant avec Saint-Victor », a-t-il confié, tout en rappelant qu'il n'avait pris part à aucune discussion en ce sens avec les parties impliquées dans la démarche actuelle.

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