Pier Dutil
La 3e guerre mondiale est enclenchée

Par Pier Dutil
Vous croyez que mon titre est exagéré? Suivez-moi jusqu’au bout et vous comprendrez que tel n’est pas le cas.
Si Donald Trump avait annoncé la mise en place de ses tarifs douaniers le 1er avril plutôt que le 2, tout le monde aurait cru qu’il s’agissait d’un poisson d’avril. Malheureusement, ce n’est pas le cas.
Il tire partout
Depuis son élection, le Président américain menaçait plusieurs pays de leur imposer des tarifs douaniers. On s’y attendait donc un peu. Mais voilà que, mercredi dernier, Donald Trump s’attaque au monde entier, visant pas moins de 185 pays. Vous avez bien lu : 185.
Il s’en prend même à des pays où il n’y a aucun habitant, comme les îles Heard et McDonald où on ne retrouve que des manchots.
Permettez-moi de mentionner une autre victime ridicule, les îles Saint-Pierre-et-Miquelon situées tout près de Terre-Neuve. J’ai eu l‘occasion de visiter ces îles en septembre dernier. Moins de 6 000 personnes y vivent. Il s’agit en grande partie de retraités et 75 % des gens qui travaillent encore le font pour le Gouvernement français. La principale industrie est le tourisme. On en exporte pratiquement rien. Malgré tout, Trump y impose des tarifs de 50 %.
Ce n’est pas compliqué, Trump tire sur tout ce qui bouge. En bon Beauceron, on dirait qu’il tire avec un douze à plombs. En agissant ainsi, le locataire de la Maison Blanche étale son ignorance. Tous les économistes américains non-partisans son unanimes à dénoncer ces mesures qui, selon eux, seront non seulement improductives, mais nuiront principalement aux Américains eux-mêmes suite aux ripostes des autres pays.
Pour justifier la mise en place de ces mesures, Donald Trump accuse tous les pays qui font affaire avec les États-Unis de les avoir escroqués. L’accusation est grave, car parler d’escroquerie, c’est parler d’un crime. Pour Donald Trump, un déficit commercial créé par des échanges entre deux pays, l’un important plus qu’il exporte, est une subvention. Pas besoin d’avoir un doctorat en économie pour comprendre que cela est faux.
Et c’est à partir de faux prétexte que Trump et ses brillants conseillers ont élaboré une formule alambiquée pour fixer le taux des tarifs à appliquer à chacun des 185 pays concernés, formule rapidement dénoncée comme stupide par l’ensemble des économistes de la planète.
Un chaos mondial
Évidemment, l’annonce de ces mesures n’a pas tardé à créer un vrai chaos au niveau mondial. Tout le monde est touché plus ou moins fortement.
Des usines ont déjà annoncé des fermetures temporaires ou définitives, des centaines de milliers d’emplois sont menacés, les marchés boursiers de partout ont effectué des plongeons rarement vus. Et, pendant ce temps-là, alors que la planète entière était en panique, Donald Trump se promenait sur l’un de ses terrains de golf. C’est ce qu’on appelle avoir le sens des priorités, n’est-ce pas?
Quand, dans mon titre, je parle d’une 3e guerre mondiale, vous devez comprendre qu’il ne s’agit pas d’une guerre occasionnée par un envahisseur avec des soldats, des chars, des bombardements, etc. qui fera des milliers de morts.
Non, il s’agit plutôt d’une guerre beaucoup plus insidieuse qui menace tous et chacun de nous de diverses façons. Des entrepreneurs voient la survie de leurs entreprises menacée, des travailleuses et des travailleurs craignent de perdre leur gagne-pain, la valeur des fonds de retraite de plusieurs millions d’individus est lourdement affectée et je choisis de m’arrêter là, alors que de nombreux autres impacts négatifs nous guettent.
Pas le temps de fêter
Au lendemain de l’annonce des tarifs douaniers, plusieurs Canadiennes et Canadiens ont poussé un soupir de soulagement se disant heureux de constater que le Canada avait été épargné.
On semble oublier que le Canada est déjà affecté par des tarifs douaniers sur l’acier, l’aluminium, le bois d’œuvre, certaines catégories d’autos, etc. Et l’imprévisibilité de Donald Trump pourrait facilement l’amener à changer d’idée en analysant son urine un bon matin et en décidant de frapper de plein fouet son voisin du nord.
Oui, présentement, il est permis de souffler un peu, mais il n’y a pas lieu de faire la fête.
Il y a de l’espoir
Malgré le chaos créé par le Président américain, un suivi de l’actualité américaine m’incite à conserver une certaine dose d’espoir. Contrairement à ce que plusieurs pensent, tous les Américains ne sont pas fous, ne sont pas tous des partisans de Trump. On en a eu quelques exemples la semaine dernière et je me permets de vous en faire part.
L’élection d’un juge à la Cour suprême du Wisconsin, un état qui a voté pour Trump en novembre dernier, a permis l’élection de Susan Crawford soutenue par les Démocrates, alors que Trump favorisait l’élection de son adversaire républicain et que Elon Musk avait investi plus de 20 millions de dollars dans la campagne du candidat républicain.
Au Sénat américain, un vote sur une motion affirmant que «Le Canada est un ami, pas un adversaire. C’est un pays souverain, pas un 51e État…» a été adopté parce que quatre Sénateurs républicains se sont joints aux Sénateurs démocrates, rompant ainsi avec la discipline imposée par Trump aux élus républicains.
Enfin, en Alaska, un autre État républicain, une résolution a été adoptée à la Chambre des représentants pour soutenir la souveraineté du Canada. On peut y lire : «La confiance et l’affection que nous portons à nos voisins canadiens s’étendent à leur identité en tant que citoyens de la nation souveraine du Canada.»
Je comprends que ces résolutions ont avant tout une valeur symbolique, mais elles sont révélatrices du début d’une fissure susceptible d’ébranler à plus ou moins long terme la solidité du parti républicain.
Plus fortes, plus nombreuses et plus grandes seront les mesures commerciales de Trump pour s’attaquer à l’ensemble de la planète, plus forts seront les impacts sur les consommateurs américains qui en feront les frais et qui finiront par se tourner vers leurs élus pour en demander le retrait, faisant ainsi un doigt d’honneur à Donald Trump.
Il faudra peut-être attendre jusqu’aux élections de mi-mandat de novembre 2026, mais cela aura une fin plus tôt que tard.
Je demeure confiant que cette 3e guerre mondiale ne durera pas aussi longtemps que les deux précédentes.
Courage
Il reste encore 1391 jours au mandat de Donald Trump.
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Pensée de la semaine
Je dédie la pensée de la semaine à Donald Trump :
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