100 millions $ en pizzas et poutines
Pier Dutil
Comme vous avez pu l'apprendre dans un article paru chez EnBeauce.com le 21 septembre dernier, l’entreprise Pizza Salvatoré vient de franchir le cap des 100 M $ de ventes.
C’est tout un exploit pour un petit restaurant fondé à Saint-Georges par un immigrant italien, Salvatore Abbatiello, venu s’établir en Beauce, au pays de son amoureuse, Angèle Fecteau.
Un peu d’histoire
J’ai encore frais à la mémoire l’image du corpulent chef qui faisait sauter ses pâtes à pizza dans la vitrine de son commerce établi dans l’ancienne ferronnerie Plante située sur la 2e avenue, voisin du Café Paris, site qui abrite aujourd’hui le club Kiwanis. Tout cela remonte à 1964.
Il importe de mentionner qu’à cette époque, la pizza n’était pas un mets très connu, surtout pas en Beauce. L’éveil des Québécoises et des Québécois à la gastronomie étrangère est apparu suite à l’Expo internationale de Montréal en 1967.
Pourtant, lentement mais sûrement, la pizza de Salvatore a conquis le palais des Beauceronnes et des Beaucerons. Quelques années plus tard, le restaurant traversait la 2e avenue pour s’établir dans un édifice plus vaste situé juste en face. La famille résidait à l’étage et le restaurant occupait le rez-de-chaussée.
Un deuxième déménagement survient, toujours sur la 2e avenue, dans un édifice qui avait abrité le commerce Jolicoeur Électrique. Le restaurant est attenant à une discothèque.
La relève
Lorsque Salvatore décide de prendre sa retraite, ses sept enfants, qui travaillaient déjà sporadiquement au restaurant, prennent la relève et entreprennent l’ouverture de nouveaux restaurants. Finalement, en 1986, c’est l’un des frères, Guillaume, qui prend les commandes. C’est également en 1986 que le menu s’élargit pour accueillir les poutines.
Ainsi, le petit restaurant de Saint-Georges prend de l’expansion et les cinq enfants du couple Guillaume Abbatiello et Caroline Bernier mettent la main à la pâte (jeu de mots facile).
Portrait de famille des dirigeants de Pizza Salvatoré. Première rangée : Caroline Bernier et Guillaume Abbatiello. Deuxième rangée, de gauche à droite, les membres de la troisième génération et dirigeants actuels : Katarina, Frédéric, Guillaume Jr, Sébastien et Élisabeth Abbatiello.
Finalement, les membres de la troisième génération rachètent l’entreprise familiale en 2018. Katarina, Élisabeth, Frédéric, Sébastien et Guillaume Jr avaient contracté un financement sur cinq ans. Il leur a suffi de 23 mois pour rembourser le prêt en entier.
Dès septembre 2020, les nouveaux dirigeants amorcent l’expansion de l’entreprise à raison de l’ouverture d’un nouveau restaurant par mois. À compter d’avril 2021, en pleine pandémie, le rythme d’ouverture de nouveaux restaurants passe à deux par mois. Cette expansion, qui ne semble pas vouloir s’arrêter, a permis de passer de 14 restaurants à 73.
Évidemment, cela ne se fait pas sans peine et les semaines de 60 à 70 heures de travail se succèdent au début.
Aujourd’hui, on retrouve des «Pizza Salvatoré» principalement au Québec, mais également au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. D’autres régions canadiennes sont dans la mire des dirigeants et on garde également un œil du côté des États-Unis.
Pas à vendre
Un tel succès dans le domaine de la restauration ne passe pas inaperçu. La chaîne Pizza Hut a déjà manifesté de l’intérêt pour acheter Pizza Salvatoré mais, à l’époque, Guilllaume avait décliné l’offre. Un autre grand groupe, dont le nom n’a pas été dévoilé, a aussi approché les cinq partenaires actuels, mais, comme leur père, ils ont préféré demeurer aux commandes plutôt que d’empocher le gros lot.
Je peux les comprendre car, cette troisième génération, elle n’est âgée que de 27 à 35 ans. Et, si je me fie au feu sacré qui l’anime, les années à venir sont fort prometteuses.
Quand il est question de relève pour une entreprise, ce n’est pas automatique que ce sont les enfants qui succéderont à leurs parents. Le sens des affaires n’est pas nécessairement génétique.
Et, lorsqu’il y a intérêt de la part d’un enfant, cela n’implique pas nécessairement toute la fratrie et c’est souvent là que les problèmes surgissent.
Dans le cas de Pizza Salvatoré, tous les membres de la troisième génération sont impliqués, phénomène plutôt rare. Une entreprise qui faisait bien vivre une famille doit maintenant en faire vivre cinq. L’expansion n’est donc pas une option; ça devient une nécessité.
Chez les Abbatiello, on a résolu le problème en déterminant de façon précise les responsabilités de chacune et de chacun. Si Guillaume Jr et Sébastien sont Co-Présidents, Katarina est Vice-Présidente à l’administration et aux finances, Élisabeth est Vice-Présidente aux communications et au rayonnement et Frédéric est Vice-Président à la construction.
Cette définition des tâches fait en sorte que chacun occupe son champ d’action. J’imagine qu’il arrive certainement des situations où les discussions doivent être animées entre frères et sœurs, mais le respect des responsabilités de chacune et de chacun assure une harmonie qui profite à l’entreprise et qui explique son succès.
Personnellement, en tant que Beauceron et amateur de pizza, je suis très fier de constater à quel point le petit restaurant de Salvatore Abbatiello lancé en 1964 est aujourd’hui devenu une chaîne respectable qui est appelée à poursuivre son expansion.
Dépasser les 100 M $ de ventes de pizzas et de poutines, ça mérite notre respect.
Pensée de la semaine
Je dédie la pensée de la semaine aux cinq frères et sœurs Abbatiello qui ont déjà mis en pratique le message contenu dans cette pensée :
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