Le plan de Justin : 500 000 immigrants par année
Pier Dutil
LE PLAN DE JUSTIN : 500 000 IMMIGRANTS PAR ANNÉE
Il vous arrive de croire que nos dirigeants politiques pensent petit? Rassurez-vous, le premier Ministre du Canada, Justin Trudeau, vient de présenter son projet : «l’Initiative du siècle».
Et qu’en est-il de cette «Iniative»? Rien de moins que de faire en sorte que le Canada compte 100 millions d’habitants en 2100.
PLEIN FEU SUR L'IMMIGRATION
2100, c’est dans 77 ans. Vous et moi, comme Justin d’ailleurs, ne serons plus là. Mettre de l’avant d’importants objectifs sur des décennies est facile, car personne ne sera là pour vérifier si ces objectifs ont été atteints.
Par contre, le plan de Justin pour atteindre ses objectifs est bien concret: accueillir 500 000 immigrants par année.
Présentement, la population du Canada est de 38,3 millions. Pour atteindre les 100 millions d’habitants en 2100, il faudra en ajouter 61,7 millions en 77 ans, soit 801 299 par année. Et cela ne tient pas compte des décès.
Avec 500 000 immigrants par année, sur 77 ans, cela représente 38,5 millions de nouveaux venus. Il faudra donc que les Canadiennes donnent naissance à 23,2 millions d’enfants, soit 301 299 par année durant cette même période. Cela est possible puisque, au cours des dernières années, on a recensé 367 684 naissances annuelles au Canada. Cependant, il faut tenir compte du fait que la population canadienne vieillit et que le taux de fertilité est constamment en baisse.
Présentement, selon les données publiées par Statistique Canada, une personne sur quatre résidant au Canada est née à l’étranger. Si le plan de Justin devait se réaliser, en 2100, la population canadienne serait composée à près d’une personne sur deux par des immigrants. Est-ce réaliste? J’ai un sérieux doute.
POURQUOI UN TEL OBJECTIF?
Selon Justin et les penseurs qui l’entourent, plus un pays est populeux, plus il peut être prospère et jouer un rôle important dans la confrérie des pays sur la planète.
Du côté de la prospérité, deux des pays les plus populeux de la planète, la Chine (1,41 milliard) et l’Inde (1,39 milliard), ne sont pas des exemples de prospérité et des millions de leurs habitants vivent dans un état de grande pauvreté.
A contrario, les quatre pays de la Scandinavie, le Danemark, la Norvège, la Finlande et la Suède, avec respectivement 5,9, 5,4, 5,5 et 10,3 millions d’habitants, font partie des pays les plus prospères au monde. C’est d’ailleurs ces pays qui se situent en tête du peloton des sondages qui mesurent le niveau de bonheur des gens.
Donc, pour la prospérité, le plan de Justin ne tient pas la route.
Quant à l’influence des pays à grande population, il est certain que la loi du nombre joue un certain rôle. Par contre, l’influence d’un pays n’est pas proportionnelle à sa population. Au cours des dernières décennies, des petits pays comme l’Afghanistan (39,8 millions) et l’Irak (41,2 millions) ont accaparé l’attention et ont tenu tête aux grandes puissances. Il en est de même présentement avec l’Ukraine (43,8 millions) qui tient tête à la Russie (143,4 millions).
Alors, quant à l’influence dans le monde d’un pays populeux, le plan de Justin fait fausse route.
Permettez-moi d’ajouter que le plan de Justin ne tient nullement compte de la culture francophone dominante au Québec. Pour maintenir sa proportion de 23 % de la population canadienne, le Québec devrait accueillir annuellement 115 000 immigrants si la cible de 500 000 nouveaux arrivants souhaitée par le Gouvernement canadien se concrétise.
ON A BESOIN D'IMMIGRANTS
Avec un taux de fécondité de 1,4 enfants par femme, alors que le taux de remplacement de la population est de 2,1, il ne fait pas de doute que le Canada a besoin d’immigrants.
Sur le strict point de vue économique, le Canada compte présentement 958 500 postes vacants. D’accord, l’immigration n’est pas la seule solution à ce problème, mais elle en fait définitivement partie.
Dans la MRC Beauce-Sartigan, présentement, on compte plus de
2 000 postes occupés par des travailleurs provenant de l’étranger. Si, du jour au lendemain, toutes ces travailleuses et tous ces travailleurs retournaient dans leurs pays d’origine, de nombreuses entreprises beauceronnes seraient dans une situation précaire. Et si l’on analysait la situation à l’échelle du Québec et du Canada, nul doute que l’on serait confronté à la même réalité.
COMBIEN EN ACCUEILLIR?
Le véritable débat ne se situe pas à savoir s’il faut accueillir des immigrants ou non, mais plutôt à savoir combien doit-on en accueillir.
La récente campagne électorale au Québec a clairement démontré que les opinions divergent grandement de ce côté. Au sein des quatre principaux partis, les cibles variaient de 35 000 à 80 000 nouveaux arrivants par année.
Mais la question du nombre n’est pas la seule à considérer. Il faut être en mesure de les accueillir, de les loger, de les intégrer, de les franciser et de les répartir sur l’ensemble du territoire du Québec. Depuis qu’il est au pouvoir, François Legault maintient sa cible de 50 000 immigrants par année, déclarant qu’il faut en prendre moins pour en prendre soin.
L’opinion de la population québécoise est passablement partagée au sujet de l’immigration. Dans un sondage de la firme SOM réalisé pour le journal Le Soleil publié la semaine dernière, 26 % des Québécoises et Québécois affirment qu’il faudrait en accueillir plus, alors que 24 % croient au contraire qu’il faudrait en accueillir moins. Enfin, 45 % maintiennent que l’on devrait continuer à en accueillir autant. Il reste 5 % des gens qui ne savent pas.
La question de l’immigration continuera à défrayer les manchettes au cours des prochaines années, mais peu importe les querelles quant au nombre d’immigrants à accueillir, le besoin est là et demeurera une préoccupation importante.
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