Des augmentations de prix hypocrites
Pier Dutil
DES AUGMENTATIONS DE PRIX HYPOCRITES
Lorsque vous faites votre épicerie et que vous revenez à la maison en ayant l’impression que vous en obtenez de moins en moins pour votre argent et que presque tout coûte plus cher, vous n’avez pas la berlue. C’est effectivement le cas.
DES AUGMENTATIONS CAMOUFLÉES
Dans notre ménage, c’est moi qui fais l’épicerie et j’avoue que j’aime ça. Depuis quelques mois, j’ai constaté un phénomène qui tend à se répandre pour un nombre de plus en plus grand de produits.
Il s’agit de ce que l’on appelle la «réduflation», mot qui signifie que les contenants de certains produits rapetissent, alors que les prix ne changent pas. Les consommateurs continuent de payer le même prix pour un produit quelconque, mais ils obtiennent une quantité moindre dudit produit, ce qui équivaut à une augmentation souvent importante.
À titre d’exemple, le contenant de jus d’orange Oasis, qui était de 1,89 litres, est passé tour à tour à 1,75, 1,65 à 1,50 litres présentement. Pourtant, le prix n’a pas changé. De 1,89 litres à 1,50 litres, cela représente une augmentation de 21 %.
Permettez-moi une autre comparaison avec le sac de croustilles Miss Vickies (mes préférées). Il y a quelques mois, le sac contenait 240 grammes. Or, maintenant, il n’en contient plus que 200, toujours pour le même prix, ce qui représente une augmentation de 16,6 %.
Un dernier exemple qui, à mes yeux, est le comble de l’hypocrisie, les contenants de biscuits Leclerc. Pour diminuer le nombre de biscuits, on a procédé à un renflement du dessous du contenant. Si vous regardez le contenant à partir du dessus, vous n’y verrez aucune différence. Mais, si vous retournez l’emballage pour voir le dessous, vous découvrirez que certaines sections sont renflées et qu’il y a des biscuits en moins.
LÉGAL MAIS...
Cette façon de procéder est tout à fait légale. Des spécialistes du marketing affirment que les consommateurs sont moins sensibles à une réduction des formats qu’à une augmentation des prix. J’admets que les consommateurs qui vérifient la dimension du contenant en faisant leur épicerie ne sont pas légion.
J’admets également que les fabricants de divers produits d’alimentation font face à d’importantes augmentations de prix de leurs fournisseurs. Il en coûte plus cher pour certaines denrées de base qui entrent dans la fabrication de nombreux aliments. De plus, d’importantes hausses des coûts de transport doivent être assumées par les fabricants. Tous ces éléments contribuent aux augmentations de prix.
Mais, plutôt que de refléter ces augmentations par une hausse clairement indiquée en épicerie, on préfère camoufler le tout par une réduction des formats, espérant que les consommateurs n’y verront rien ou presque.
Oui, cette façon de faire est légale, mais, à mes yeux, c’est hypocrite.
TOUJOURS PLUS CHER
Malheureusement pour les consommateurs que nous sommes, il n’y a pas que l’épicerie qui coûte de plus en plus cher de ce temps-ci. En septembre, l’indice des prix à la consommation (IPC) au Québec a connu une hausse de 5,1 %, ce qui ne s’était pas vu depuis près de 30 ans.
Cet IPC, il est calculé sur une base mensuelle par Statistique Canada à partir d’un panier de produits dont on compare les prix de mois en mois. Or, Statistique Canada effectue son étude à partir de seulement trois chaînes alimentaires canadiennes et de quelques centaines de produits seulement.
Sylvain Charlebois, directeur principal du laboratoire des sciences analytiques en agroalimentaire à l’Université Dalhousie à Halifax, dans une opinion publiée dans La Presse+ du 28 octobre dernier, mettait en doute les données de l’IPC de Statistique Canada en les comparant à celles de Better Cart, une firme canadienne qui récolte plusieurs millions de données hebdomadairement concernant les prix des denrées alimentaires.
À titre d’exemple, alors que Statistique Canada affirme que le prix de la bouteille de ketchup a diminué de 5,9 %, Better Cart dit constater plutôt une hausse de 7,3 %, Toute une différence, n’est-ce pas? Plusieurs autres exemples du genre pourraient être citées.
Finalement, que les données de Statistique Canada soient précises ou non, pas besoin d’un doctorat en économie pour constater que tout coûte de plus en plus cher.
Et ces augmentations ne concernent pas que les denrées alimentaires. À lui seul, le prix de l’essence a crû de 35 % en quelques mois pour se retrouver à plus de 1,50 $ le litre, un prix fortement exagéré.
Et il en va de même dans presque tous les domaines. Les prix d’achat d’un véhicule ont augmenté de façon importante. Même chose pour les coûts reliés au logement, etc.
BAPTISTE PAIERA
Et pendant ce temps-là, les augmentations de salaires tournent autour de 2 à 2,5 %. Si les prix augmentent de 5 % et plus et que les revenus des consommateurs plafonnent, on assiste donc à un appauvrissement des consommateurs.
Je comprends facilement qu’en bout de ligne, c’est toujours Baptiste qui finit par payer. Mais à force d’appauvrir Baptiste, on risque de compromettre le développement de notre économie. Le jour où les gens n’auront plus les moyens de se procurer les produits sur les tablettes, ces produits resteront sur les tablettes et les fabricants en souffriront.
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