Le CISSS perd le contrôle des rendez-vous de l’hôpital de Saint-Georges

Par Stéphane Quintin, Journaliste
Les médecins spécialistes du centre hospitalier de Saint-Georges ont tenu à exprimer leur grande inquiétude concernant le « fonctionnement chaotique » de la centrale des rendez-vous de l’hôpital en adressant cette semaine une lettre au directeur général du CISSS-CA, Daniel Paré. Le document fait état d’une situation alarmante portant préjudice au bon suivi des patients. Le CISSS assure que le dossier fait partie des priorités.
« La situation est simplement catastrophique », « actuellement, c’est le chaos », « il est urgent d’apporter des correctifs majeurs ». Dans une lettre adressée au CISSS le 25 janvier dernier par des médecins de Saint-Georges à l’initiative du Dr Philippe St-Gelais, les praticiens beaucerons n’ont pas mâché leurs mots pour dénoncer la situation préoccupante du service des rendez-vous de l’hôpital, qu’ils jugent incapable de respecter des délais appropriés, provoquant des « manques déontologiques graves en ce qui a trait au non-respect des urgences ». Dans une nouvelle lettre adressée cette semaine au CISSS par 36 médecins spécialistes de l’hôpital, les praticiens signataires annoncent qu’ils sont à bout : « On promet un recrutement qui ne vient pas, mais on paie des milliers de dollars en temps supplémentaire. On épuise le personnel en place, qui finit par aller voir ailleurs, faute d’écoute et de conditions de travail favorables. Il est URGENT d’AGIR ! »
Une pression accrue depuis l’arrivée du système APSS-CRDS
Formulaires urgents expédiés aux mauvaises spécialités ou envoyés malgré l’absence de médecins, manque de personne ressource clairement identifiée, problèmes de formation du personnel : de nombreux enjeux avaient été soulevés par le Dr Philippe St-Gelais au mois de janvier dans la lettre signée avec deux de ses consœurs. Consciente de la pression déjà forte dans les centrales de rendez-vous, la directrice des services multidisciplinaires, Marie-Claude Bélanger, y avait répondu un mois et demi plus tard en annonçant des rencontres imminentes concernant le système APSS-CRDS (Accès prioritaire aux services spécialisés, Centre de répartition des demandes de services), dont la mission est de référer les patients à un médecin spécialisé.
Une nouvelle lettre envoyée cette semaine pour faire pression sur le CISSS
Selon le Dre Karzazi, impliquée dans le dossier, le système CRDS est venu s’ajouter à une problématique déjà existante d’épuisement du personnel en place à la centrale des rendez-vous, « incapable de remplir adéquatement sa mission en raison de nombreuses démissions et congés de maladie non remplacés, et en l’absence d’une politique de recrutement et de rétention du personnel efficace ». Dans une nouvelle lettre adressée cette semaine à Daniel Paré, directeur général du CISSS-CA (Centre intégré de santé et des services sociaux de Chaudière-Appalaches), 36 médecins spécialistes du centre hospitalier de Saint-Georges ont réitéré leur désarroi face au « fonctionnement chaotique de la centrale des rendez-vous de l’hôpital ».
« Nos patients pensent qu’ils sont oubliés. La situation n’est plus tenable »
Très préoccupée par le dossier, au côté de tous les signataires, le Dre Karzazi dénonce un gros problème de personnel à bout de souffle, accablé par des heures supplémentaires et un manque de recrutement préjudiciable pour le suivi des patients. « Malgré toute leur bonne volonté, à la centrale de rendez-vous, une course contre la montre se déploie tous les jours, à tel point qu’on est amené à faire appel à nos propres secrétaires pour venir les seconder. On a vraiment l’impression que les responsables de l’administration sont dans leur tour d’ivoire, incapables de mesurer ce qu’il se passe sur le terrain ». Parmi les dérives dénoncées, elle et ses confrères déplorent notamment un manque cruel d’organisation, avec des coups de fil passés à la dernière minute pour offrir des rendez-vous aux patients le lendemain, décalés à une date ultérieure s’ils ne sont pas en mesure de se libérer pour s'y rendre. Ces délais trop courts sont notamment pénalisants pour les personnes âgées qui ont besoin de plus de temps pour trouver un transport ou un accompagnateur et provoquent de nombreux trous dans les horaires des médecins.
Le CISSS reconnaît les difficultés et promet des mesures prioritaires
Porte-parole du CISSS-CA, Mireille Gaudreau a annoncé que le problème avait été discuté cette semaine avec des médecins durant la table de coordination clinique locale. « Oui, la gestion des rendez-vous est un enjeu prioritaire. Beaucoup d’efforts sont mis en place pour augmenter la cadence et surveiller les délais d’attribution des rendez-vous. L’objectif avancé serait de prévenir les patients au moins deux semaines à l’avance. » Selon elle, le CISSS a bien pris conscience des difficultés et Pierre Gagné, directeur adjoint des services multidisciplinaires de l’hôpital, a annoncé la mise en place de procédures plus efficaces pour mieux desservir la population. « Le virage est en cours et amènera à plus d’efficacité dans les délais de prise de rendez-vous ».