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Immigration temporaire et permanente

La Beauce face aux nouvelles mesures d’immigration : un impact économique redouté

durée 18h00
11 novembre 2024
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Germain Chartier
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Par Germain Chartier, Journaliste

Les récentes annonces du Gouvernement du Canada et du Gouvernement du Québec sur les restrictions concernant les travailleurs étrangers temporaires et les programmes d’immigration suscitent des préoccupations majeures dans la région de la Beauce.

EnBeauce.com a recueilli les réactions d’acteurs clés de la région, des entreprises locales aux représentants politiques, qui expriment leurs inquiétudes quant aux répercussions potentielles sur l’économie locale et la stabilité des communautés.

En effet, le Gouvernement du Canada a annoncé des mesures restrictives sur l’embauche de travailleurs étrangers temporaires, notamment en limitant à 10 % la proportion de ces employés dans les entreprises pour des postes à bas salaires, en restreignant l’accès au programme pour les régions où le taux de chômage dépasse 6 %, et en augmentant le seuil salarial de qualification pour les postes à haut salaire à 32,96 $ de l’heure.

Cette requalification du statut de certains travailleurs, combinée à la limitation d’un an pour les contrats de bas salaires, place les entreprises de plusieurs régions, dont la Beauce, dans une situation délicate.

De son côté, le Gouvernement du Québec a également pris des mesures en mettant sur pause deux programmes d’immigration pour huit mois : le Programme de l’Expérience Québécoise (PEQ), destiné aux diplômés, et le Programme régulier des travailleurs qualifiés (PRTQ). Le Québec entend, comme le fédéral, revoir à la baisse ses seuils d’immigration pour 2025-2026 afin de répondre à sa capacité d’accueil limitée.

Le secteur industriel en première ligne

Pour l’entreprise Manac, spécialisée dans la fabrication de semi-remorques, les nouvelles réglementations représentent un défi de taille. Steve Ceolin, Vice-Président des ressources humaines, partage son inquiétude : « Il y a des gens qui ont quitté leur vie pour venir nous aider, qui participent à la création de richesse pour notre entreprise, mais aussi dans la communauté, et à cause de ces nouvelles mesures, certains vont se voir refuser leur demande de renouvellement de permis, et on va les perdre. Ça va entraîner des conséquences économiques en Beauce, car il y a des propriétaires de logements qui vont perdre leurs locataires. »

Le Vice-Président précise également l’impact des hausses de seuils salariaux : « Le gouvernement fédéral a passé le ‘bas salaire’ de 27,47 $ à 32,96 $, ce qui rend la tâche encore plus difficile aux entreprises. Tous nos travailleurs étrangers ne se qualifient pas pour être des ‘hauts salaires’, malgré qu’ils gagnent autour de 30 $ de l’heure. Avec l’ancienne règle, on s’en sortirait, mais avec l’augmentation, ça touche tous nos travailleurs qui n’ont pas leur résidence permanente. »

Par ailleurs, M. Ceolin déplore le stress et l’incertitude que les renouvellements annuels de permis engendrent pour les travailleurs : « Supposons qu’un travailleur étranger temporaire est dans l’année de son cycle de renouvellement. Le gouvernement va analyser le pourcentage de travailleurs étrangers temporaires chez Manac, et même si tu es quelqu’un qui a 10-12 ans d’ancienneté et est parfaitement intégré, tu vas être refusé. »

La restauration : un secteur sous tension

Les nouvelles règles affectent également la restauration. Chantale Ross, propriétaire des franchises McDonald’s de Saint-Georges et Lac-Mégantic, décrit l’impact du quota de 10 % sur ses opérations : « Lorsque j’aurai des permis qui arriveront à échéance, et que je ne respecte pas les 10 % de travailleurs étrangers temporaires par restaurant, l’excédent devra repartir. »

Mme Ross évoque aussi la difficulté de recruter localement : « Je veux bien engager des travailleurs Québécois et Canadiens, mais du monde qui viennent porter leur CV pour les quarts de nuit et de soir, je n’en ai pas. Ce qui va arriver, c’est retour à la case départ ; on recule en arrière, et les premiers quarts à être fermés sont ceux de nuit. »

Des mesures qui menacent la stabilité des entreprises locales

Hélène Latulippe, directrice générale du Conseil économique de Beauce, souligne les risques économiques que ces nouvelles réglementations font peser sur la région : « Les nouvelles mesures encadrant les travailleurs étrangers temporaires posent un défi majeur pour l’économie locale, particulièrement dans des régions comme la Beauce, où la pénurie de main-d’œuvre freine déjà la croissance de nos entreprises. »

Elle ajoute que la hausse du salaire minimum applicable aux postes à bas salaire et la réduction des seuils d’admissibilité pour les travailleurs étrangers temporaires « impactent directement la production de nos entreprises. »

« Afin d’éviter des répercussions négatives sur l’économie de la Beauce et de protéger nos entreprises locales, nous appelons le gouvernement à reconsidérer ces mesures. Il est essentiel que les politiques en place reflètent les réalités du terrain et soutiennent le développement de nos entreprises dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre. », a-t-elle complété.

Des points de vue politiques divergents

Sur le plan politique, les approches diffèrent. Samuel Poulin, député de Beauce-Sud, justifie les restrictions provinciales par la pression sur les infrastructures locales : « La capacité d’accueil en Beauce est atteinte. Cela met une pression sur le réseau de la santé, sur le réseau de logement et sur les cours de francisation. C’est pour ces raisons qu’au Gouvernement du Québec, nous avons décidé de mettre en pause deux programmes, soit le Programme de l’Expérience Québécoise (PEQ) et le Programme Régulier de Travailleurs Qualifiés (PRTQ). »

Richard Lehoux, député fédéral de l’opposition en Beauce, critique quant à lui le manque de prévoyance dans les décisions du gouvernement fédéral : « Il n’y a eu aucune consultation et rien n’a été fait pour prévenir les entreprises. Certains m’ont déjà dit qu’elles allaient fermer des quarts de travail. Il y aurait pu avoir un moratoire en disant qu’on laissait deux ans aux entreprises pour s’adapter. Là, à chaque renouvellement de permis, les gens vont se faire dire non, et les entreprises n’ont pas d’option. »

Les nouvelles mesures suscitent des inquiétudes profondes en Beauce, où les entreprises, les représentants politiques et les acteurs économiques s’unissent pour demander une révision de la politique fédérale.

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