Réaction sur l'économie beauceronne suite à la fermeture de l'imprimerie l'Éclaireur de Beauceville
Cette fermeture fait couler beaucoup d'encres depuis lundi. La mise à pied des 155 travailleurs et travailleuses de l'imprimerie l'Éclaireur de Beauceville bouleverse les propriétaires des commerces environnants indubitablement touchés par la nouvelle. Ce qui est choquant dans cette histoire, c'est la manière drastique avec laquelle les 155 employés ont été mis à la porte. Certains disent que c'est un manque total de diplomatie et d'autres disent que c'est à la hauteur de Pier-Karl Péladeau qui n'est « pas la bienvenue en Beauce par les temps qui courent »,de dire le maire de Beauceville, M. Jean-Guy Bolduc. Pour compenser les loyaux travailleurs qui ont consacré plus de 30 ans de leur vie à cette entreprise, Quebecor World s'engage à verser 12 semaines de salaire ainsi que les sommes dues en vertu de la Convention collective (vacances, etc.), soit le minimum prévu par le Code du travail. Dans le journal le Soleil, M. Jacques De Coster y va même jusqu'à se demander « Où était Pierre-Karl Péladeau lors des cours d'éthique et de responsabilité sociale à l'université? »
Depuis qu'ils ont commencé à faire le ménage dans leurs affaires, les représentants de Québecor se sont départis de 2000 travailleurs, dont 550 aux États-Unis. L'imprimeur fermait, cette semaine, une installation de Lincoln au Nebraska, abolissant ainsi 550 emplois. Dans une entrevue accordée à Radio-Canada, le porte-parole de Québecor World, Luc Lavoie, affirme que la décision ne repose pas sur la rentabilité : « La question ne se pose pas en ces termes là du tout. La question est de savoir si Quebecor World est en santé ou pas et Quebecor World traverse une période assez difficile ».
Opinions publiques
Le maire de ville Saint-Georges, M. Roger Carette, affirme que la répercussion est globale, peu importe où se situe l'entreprise qui ferme ses portes. « La main-d'oeuvre sera déployée sur le territoire. Nous sommes tous victime et choqués de la manière peu cavalière, je dirais même sauvage, d'annoncer cette fermeture.', affirme M. Carette. Dans ce groupe de travailleurs, une trentaine résidaient à Saint-Georges et près d'une dizaine à Saint-Simon-les-mines. Les autres provenaient de Beauceville et des environs. Mais peu importe le lieu d'origine, M. Carette croit que l'économie est une affaire régionale et que tous le monde en est affecté. “J'appuie M. Bolduc (maire de Beauceville) dans ses démarches. Nous ne pouvons dévoiler le stratagème mis en place par la municipalité de Beauceville, mais je tiens à dire que si nous pouvons les aider, nous allons le faire ‘. M. Carrette soutient que les anciens travailleurs de Quebecor n'auront pas de difficulté à se trouver un emploi; « La génération des 35 — 40 ans se tient debout et, grâce à eux, nous avons de bonnes entreprises qui offrent de l'emploi ».
Rencontré lundi, le maire de Beauceville, Jean-Guy Bolduc, affirmait qu'il avait des doutes sur cette fermeture; « Nous nous doutions que cette entreprise allait fermer depuis la publication de leurs états financiers. Ce n'était pas joli!» M. Bolduc fait même preuve de positivisme en déclarant; ‘Une nouvelle page se tourne pour eux et pour leurs employés », parole qui plut au maire de Saint-Georges. De plus, le maire de la ville touchée prétendait que le Directeur général du CLD Robert-Cliche ferait tout pour repérer le plus d'emplois possible dans le but de les offrir aux travailleurs sortant de l'imprimerie l'Éclaireur.
Directeur général du Centre Local de Développement (CLD) Robert-Cliche, M. Daniel Chaîné rencontrait les 155 travailleurs, hier après-midi. « Un consultant va rencontrer chacune des personnes afin de les aider à retrouver du travail. Nous avons également remis un document avec tous les emplois possibles dans le secteur de l'imprimerie. Le centre local de développement donne les coordonnés de ces entreprises ». M. Chaîné compte environ 35 entreprises d'imprimerie dans la Beauce. Ces établissements englobaient 1500 emplois moins les 155 qui viennent de s'envoler. En 2005, ces 35 entreprises investissaient 8,9 millions de dollars dans l'embauche de travailleurs beaucerons. « Nous appuyons les travailleurs dans leurs démarches, raconte l'homme. Nous avons une richesse incroyable; 155 personnes formées avec, pour plusieurs d'entre eux, 30 à 40 ans d'expérience ». Selon ses dires, le moral des travailleurs est ordinaire malgré le très bon support qui leur est offert. De plus, leur syndicat les appuie très bien. Sur la fermeture de Québecor, à Beauceville, M. Chaîné croit ceci; « C'est rare, dans une entreprise, de voir une si grande loyauté de la part des employés. De fournir douze semaines de salaire est une piètre reconnaissance pour des travailleurs qui se sont dévoués pendant 30 ou 40 ans ».
Une fois mis au courant, beaucoup d'anciens travailleurs se sont réuni au restaurant le Normandie, lundi après-midi, pour discuter de leur sort. Nancy Boucher, propriétaire du restaurant, raconte : « Lundi après-midi, ils sont tous venus ici pour discuter. Ils sont tous de bons clients. L'un d'eux m'a dit ‘Tu vas faire une grosse après-midi avec nous.’ Je lui ai répondu que je préférerais avoir une petite après-midi et les garder occasionnellement. La première dépense que l'on coupe lorsque le budget ne nous le permet pas, c'est le restaurant.< ...> Lundi, l'ambiance n'était pas à la fête. <...> Je connais une famille dans laquelle la femme, le mari et même l'enfant travaillaient pour l'entreprise de Québecor. C'est un dur coup! Ils sont toutefois motivés à trouver de l'emploi à l'extérieur. <...> La période des fêtes est terminée, c'est une période tranquille qui s'annonce et avec la fermeture de l'imprimerie, j'espère que ça ira bien. Je n'ai pas peur par contre. »
De l'espoir?
À l'imprimerie Commerciale de Beauce, à Saint-Joseph, la propriétaire Mme Breton ne se disait pas affectée par la fermeture de Québecor; « Nous sommes une petite entreprise. Nous n'avons pas le même marché que ces grosses imprimeries. Nous avons reçu quelques CV, mais nous n'avons pas de place étant donné que j'ai quelques employés, en congés de maternité, qui reviennent en poste. »
La nouvelle imprimerie de Saint-Jules, nommée Norecob, a déjà accueilli 70 personnes. L'un des propriétaires, M. Bernard Giguère affirme que l'entreprise devrait ouvrir dans les deux prochains mois. D'ici là, la vingtaine de personnes en poste s'occupent de mettre les équipements en place. L'ouverture imminente de Norecob vient prouver la véracité de l'un des commentaires du maire de Beauceville. Ce dernier disait que lorsqu'une grande entreprise ferme, il peut en découler de petites.
M. Louis-Maurice Chabot, Directeur adjoint du Centre de formation des bâtisseurs, ne décourage pas ses élèves. Les huit finissants du centre d'imprimerie de la Chaudière y voient peut-être une perte de débouché, mais M. Chabot ne perd pas espoir. « C'est certain que ça enlève de l'emploi dans la région. C'est dur de voir les répercussions maintenant. Avant, nous avions plus de demandes que le nombre de finissants que nous pouvions fournir. Peut-être que certaines entreprises s'empêchaient d'agrandir vu un manque de personnel ce qui ne sera plus le cas désormais, qui sait? S'il y a une imprimerie qui offre de l'emploi à Saint-Romuald, combien, des travailleurs de Québecor, voudront s'y déplacer? <...> J'espère que la Chine ne nous fera pas assez de mal pour ramasser les contrats d'ici. Il faudra observer ça dans les prochains mois, il est difficile de dire ce qu'il en est maintenant. »
En 2008, l'imprimerie l'Éclaireur aurait fêté ses 100 ans.
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