La plupart le savent, la pire débâcle de notre histoire est survenue en avril 1896. La violence et l'énormité des glaces ont été telles que les maisons ont été soulevées et arrachées de leur emprise et sont parties à la dérive, déambulant pêle-mêle sur la 1re avenue, comme on le constate à la première photo. Spectacle incroyable. On y voit la situation désolante dans le secteur de l'intersection de la 120e rue. Évidemment, 124 ans après ces incidents spectaculaires, aucun témoin visuel n'existe plus depuis longtemps, de sorte que personne ne peut aujourd'hui indiquer qui sont les propriétaires des édifices illustrés sur cette photo exceptionnelle. Heureusement, le notaire Louis Moisan (décédé en 1910) a dessiné un croquis identifiant plusieurs des immeubles enchevêtrés dans le chaos indescriptible de cette catastrophe terrible (photo 2). Voyez le schéma des lignes de toits des maisons apparaissant sur la 1re photo. Des numéros sont écrits, correspondant aux noms des différents propriétaires. Voici donc les noms de chacun: 1- Fromagerie Pelletier. 2- Moïse Poulin. 3- Napoléon Drouin. 4- Georges Lemelin. 5- Ludger Poulin. 6- Alfred Martinette. 7- Le marchand Ephrem Poulin (2e magasin, près du pont). 8- Hôtel Maguire (en face du pont). 9- Alfred Perron. La maison de ce dernier est difficile à voir, très pâle, au-dessus d'une cheminée, on ne voit qu'une partie du toit, elle est penchée puisque cette bâtisse fut arrachée de ses fondations. Pour aider à voir à quoi ressemblait la rue dans les semaines avant la débâcle, j'ajoute une photo montrant le village tel qu'il était dans les jours précédant cet incroyable cataclysme (photo 3). Alors, si vous ne reconnaissez pas les maisons correspondantes à celles des croquis, remontez à ma chronique du 26 juillet dernier pour connaitre les noms des propriétaires (avant l'inondation) qui sont pour la plupart identifiés. La 4e photo nous montre à peu près le même secteur, mais a été prise dans une perspective très différente, on y voit les édifices de dos par rapport à la première avenue. On réalise aussi que les constructions étaient érigées beaucoup trop près de la rivière, ce qui explique qu'elles étaient fréquemment inondées lors des débâcles printanières. L'enlèvement de l'ile en 1966, l'érection du barrage Sartigan, et la hausse et l'élargissement du remblai (avenue Chaudière, maintenant Promenade Redmond, protégée par le mur de soutènement adossé à l'ancien quai Pinon) derrière les bâtiments de la 1re avenue ont beaucoup contribué à minimiser le débordement de la rivière au centre ville. Ce qui ne signifie pas que nous sommes totalement à l'abri des sautes d'humeur de la Chaudière. Comme plusieurs s'en souviennent, la dernière grosse débâcle dans notre ville a eu lieu il y a 34 ans, en 1986. On n'est pas exempt de cette menace. Contentons-nous de regarder les photos d'archives passées et souhaitons ne jamais revivre un tel drame.
Photo 1 de la BAnQ. Croquis 2 du fonds Moisan de la SPB. Photos 3 et 4 du fonds Claude Loubier. Texte et recherches de Pierre Morin.
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