C'est au début de 1929 que fut érigé le 2e pont de fer, durant l'un des plus rigoureux hivers que Saint-Georges ait connus. Comme pour le pont de 1912, on le construisit en hiver pour s'installer sur l'épaisse glace plutôt que d'avoir à travailler dans l'eau. Durant la construction de ce nouveau pont, un incident majeur retarda grandement les travaux. On venait à peine de terminer l'installation des échafaudages lorsqu'une importante débâcle emporta tout le chantier d'un seul coup. C'est de peine et de misère que les constructeurs réussirent à récupérer toutes les pièces de bois nécessaires aux fondations. Ils durent reprendre le tout au complet. En plus, l'ouvrier Joseph Labbé perdit la vie lorsqu'il chuta de haut sur la glace. On a quand même livré et ouvert le pont dès la fin du printemps. Cette noble structure a fait l'orgueil des géorgiens pendant plus de 40 ans. Il fut remplacé par le pont actuel en 1970 et démoli au cour des mois de mai et juin 1971.
Il est remarquable de constater sur la 1re photo que la nouvelle section (à droite) côtoie l'ancienne section (à gauche), les deux reposant sur le même pilier central, ce qui signifie que ces deux ponts furent situés exactement au même endroit l'un que l'autre. Un truc pour distinguer le pont de 1912 de celui de 1929: le plus vieux était constitué d'arches droites (plates) tandis que celui de 1929 avait les arches recourbées (bombées) vers le haut. On le constate aussi à la 2e photo, de même qu'un petit bâtiment qui fut érigé à l'entrée ouest pendant la construction, où les ouvriers devaient aller se réchauffer de temps à autre.
Détail important: en 1928-29, M. Édouard Lacroix acheta le vieux pont (celui de 1911) pour le transporter et le reconstruire sur la rivière St-Jean loin dans les forêts du Maine, où il exploitait des coupes de bois. Au début de 1929, les abords du pont furent pris d'assaut par les ouvriers de la Madawaska (une compagnie appartenant à Lacroix). Ceux-ci furent accueillis par des centaines de curieux avides d'assister à son démontage. Il y eut donc deux équipes qui travaillèrent côte à côte. Dès que les employés de Lacroix eurent fini de démanteler la 1re arche, les ouvriers du constructeur entreprirent l'édification du nouveau pont (photo 1). Pendant plusieurs jours, ceux de Lacroix démontèrent l'ancien pont pièce par pièce, les retirèrent et les chargèrent sur des plates-formes munies de patins. Ces traîneaux furent finalement accrochés aux tracteurs Lombard (log haulers), dont la section avant était munie de skis glissant sur la neige ou la glace. On se dépêcha de les transporter avant que ne fonde l'épaisse couche de neige recouvrant les routes. Reformée, la caravane quitta Saint-Georges et entreprit son grand voyage dans cette région malaisée des forêts du Maine où le pont fut réinstallé.
Photos du fonds Claude Loubier. Texte et recherches de Pierre Morin.
|
Pour partager votre opinion vous devez être connecté.