Nous joindre
X
Rechercher

Le mur du son

durée 06h00
2 mai 2021
duréeTemps de lecture 6 minutes
Par
Hugues Drouin

le mur du son

Comme vous l’avez sans doute remarqué, je n’ai pas écrit beaucoup d’articles dans les derniers mois portant sur l’aviation. Lors du début de ce projet, j’avais pensé écrire un article aux 3 semaines.

Mon projet incluait, entre autres, la description de certains voyages au Canada et aux USA ainsi qu’à différents spectacles aériens un peu partout au Québec et ailleurs, comme celui qui a lieu annuellement à Oshkosh au Wisconsin. Ce spectacle à lui seul, attire plus de 600 000 personnes et 10 000 avions. J’avais également prévu faire des entrevues avec différentes personnalités du monde de l’aviation. Mais bon, la pandémie a tout bouleversé mais ce n’est que partie remise.

Dans cet article, je vous parlerai du mur du son. Plusieurs personnes en ont entendu parler mais peu de gens comprennent bien le phénomène. Je vais donc essayer de démystifier le tout en des termes simples. Je vous avise immédiatement que je ne suis pas un physicien et si c’est votre cas, vous allez peut-être trouver le tout un peu sommaire et c’est précisément le but de cette chronique. 

La notion du mur du son est apparue au milieu des années 40, après la fin de la seconde guerre mondiale, alors que les avions étaient de plus en plus performants.

En avril 1945, un pilote allemand aurait été le premier à franchir le mur du son en mettant son avion (Messerschmitt ME262) en piqué d’une altitude de 38 000 pieds. Son indicateur de vitesse aurait bloqué à 1 100 km/h et l’avion se serait mis à être violemment secoué, le pilote ignorant complètement ce qui se passait.


Par la suite,  un pilote anglais (le fils du constructeur De Havilland) perdit la vie lorsque son avion se désintégra en essayant de dépasser cette vitesse.

C’est finalement le capitaine Chuck Yeager, de la US Air Force, qui franchit le premier volontairement le mur du son le 14 octobre 1947 dans le Bell X-1,  et ce, sans accident, ni incident. Depuis ce temps , de grands progrès ont été franchis afin de permettre aux avions de voler à plus de Mach 1, soit une fois la vitesse du son qui s’établit à environ 1 230 km/h (ou 762 mi/h), dépendamment de la température, de l’air ambiant et de l’altitude.


Il n’y a pas seulement les avions qui peuvent franchir la vitesse du son. Le 15 octobre 1997, le Trust SSC, un bolide conçu spécialement pour ce but,  a atteint la vitesse du son dans le désert du Nevada.


Plus récemment, le 14 octobre 2012,  Felix Baumgartner a été le premier homme à franchir le mur du son en chute libre à la vitesse de 1 357km/h, soit Mach 1,25. Il sauta d’un altitude de 39 kilomètres soit environ 128 000 pieds. Moins médiatisé, mais tout aussi spectaculaire , le vice-président de Google, Alan Eustace, a sauté d’une altitude de 136 000 pieds en octobre 2014. Cet exploit, en date d’aujourd’hui, tient toujours.

Il existe également d’autres objets qui peuvent franchir le mur du son ou s’en rapprocher. En effet, quelques hélices d’avion, que l’on retrouve sur des appareils de type Cessna, ont une longueur de 84 pouces de long. Ce qui signifie qu’à 2700 tour/minute, le bout de l’hélice atteint une vitesse approximative de 1 243 km/h . C’est ce qui peut donner un son vraiment aigu lors du décollage. Ce son spécifique n’est pas celui du moteur mais bien du bout de l’hélice qui peut franchir le mur du son en tenant compte de la température ambiante et de la vitesse de l’avion.

Finalement, un autre objet peu connu aujourd’hui mais utilisé il y a encore quelques décennies est le fouet. Le bout du fouet, lorsqu’utilisé avec force, peut franchir le mur du son, ce qui lui donne ce son caractéristique. Ce n’est que les derniers centimètres qui viennent atteindre cette vitesse, mais c’est suffisant pour créer cette onde de choc avec le son qui le caractérise si bien.

L’appareil le plus connu pour avoir franchi le mur du son est sans contredit le Concorde. Cet avion magnifique volait à une vitesse de croisière de Mach 2,02 soit environ 2 145 km/h (1 330 mi/h), à une altitude de moyenne de vol de 55 000 à 60 000 pieds. Petites informations que vous ignorez peut-être sur le Concorde. 

En volant à Mach 2, cet avion fait face à énormément de chaleur d’environ 127 degrés Celsius alors que la température extérieure à cette altitude est d’environ moins 60 degrés Celsius. Cela avait d’importantes répercussions .

Entre autres,  le Concorde s’allongeait de 23 cm (9 pouces) à cette vitesse et nécessitait l’utilisation de trois systèmes d’air climatisé, dans le cas du bris d’un de ses équipements. Le Concorde devait ralentir en vitesse subsonique. Cela s’est produit une fois alors que l’appareil faisait le vol Paris-New-York et qu’il a dû atterrir à St-John (Terre-Neuve) pour refaire le plein, car son optimisation était à Mach 2 et non à des vitesses subsoniques.
 

Rappelons que nos avions modernes de transport volent à environ Mach 0,80 à une altitude moyenne de 36 000 pieds. Certains volent légèrement plus vite, mais aucun appareil civil ne peut dépasser le mur du son, et ce principalement pour deux raisons: la géométrie de la carlingue et des ailes ainsi que la puissance des moteurs dont ils sont munis.

En effet, pour avoir la force nécessaire de franchir le mur du son, il faut énormément de puissance. Les avions munis de réacteurs à post-combustion (after-burner) sont ainsi en mesure de franchir ce fameux mur du son. 

Mais qu’en est-il exactement ? Je vais essayer de vous l’expliquer en termes simples.

Mon exemple est quelque peu  boiteux mais va grandement vous aider à comprendre le phénomène. Le son est en réalité une onde qui se propage dans l’air. Je vous rappelle que l’air est un fluide et un peu comme un bateau qui fait des vagues, ces dernières se dissipent peu à peu autour de l’avion. La vitesse de ces ondes est d’environ 760 m/h (1 230 km/h).

 Lorsque l’avion atteint cette vitesse , il doit combattre une force qui lui permettra de défoncer le début de ces ondes. Imaginez une charrue à neige avec une gratte en avant en forme de V. On comprend que la neige va s’en aller de chaque côté de la charrue.  On comprend également que cette neige va créer une résistance de plus en plus grande à mesure que la vitesse de la charrue augmente, donc cela va demander de plus en plus de puissance. Imaginons que notre charrue atteint la vitesse de 1 230 km/h: c’est comme si, à ce moment, le nez de la charrue devançait l’amoncèlement de neige en avant de la gratte, ce qui nécessiterait alors beaucoup moins d’énergie. La neige qui serait dispersée à ce moment constitue pour nous cette onde de choc qui fait ce bruit incroyable. C’est cette même onde de choc qui risquerait de briser les vitres des fenêtres des maisons. Les vitres des automobiles étant plus résistantes, l’effet destructeur serait beaucoup moins grand.

Je vous invite à consulter ces deux sites qui expliquent encore mieux que moi ce phénomène.
https://www.youtube.com/watch?v=TkQ7Mc41Vsw
https://www.youtube.com/watch?v=gBHU0QIM3Ik


Pour terminer, tous les spectateurs qui étaient présents au spectacle aérien qui a eu lieu le 24 juin 2014 à Saint-Georges-de-Beauce, ont été témoin d’un phénomène appelé Singularité Prandtl-Gauert  qui se produit quand l’avion s’approche de la vitesse du son . Ce fut un des moments mémorables de ce spectacle. Je remercie d’ailleurs, mon ami Jean-Pierre Bonin pour cette magnifique photo.

En espérant que cet article aura su répondre à quelques interrogations au sujet du mur du son, je vous laisse en vous souhaitant une bonne fin de pandémie en espérant un retour rapide à une vie plus normale.

Voir les autres textes du blogue Aviation

commentairesCommentaires

1

Pour partager votre opinion vous devez être connecté.

  • O
    observatrice
    temps Il y a 3 ans
    Très intéressant. Merci.
app-store-badge google-play-badge