L'organisme a reçu une mise en demeure
Le Château Beauce au cœur d’un conflit entre la Société Alzheimer et le ministère de la Culture
La Société Alzheimer Chaudière-Appalaches (SACA) a dénoncé ce mardi 5 décembre, le « manque de compréhension » du ministère de la Culture et des Communications du Québec, à la suite d’une mise en demeure reçue le 28 novembre dernier.
L’organisme, propriétaire du Château Beauce depuis 2014, affirme ne plus être en mesure d’assumer les responsabilités liées à ce bâtiment patrimonial situé à Sainte-Marie, largement endommagé par les inondations de 2019.
Lors de la conférence de presse tenue ce matin à son bureau, la SACA a réitéré son objectif principal : accompagner les familles touchées par la maladie d’Alzheimer dans la région de Chaudière-Appalaches.
« Nous ne mettrons pas en péril notre mission pour rénover un bâtiment », a martelé Sonia Nadeau, directrice générale de l’organisme. Vicky Vézina, présidente de la SACA, a également critiqué « les menaces » du ministère et appelé à recentrer les priorités sur les bénéficiaires de l’organisme.
La SACA a vivement contesté les exigences du ministère, les qualifiant d’irréalistes et incompatibles avec sa mission. « Nous ne voulons plus être propriétaires et ne plus avoir aucun lien avec le Château Beauce. C’est un puits sans fond d’énergie, de temps, de stress et d’argent », a déclaré la directrice générale.
Dans sa mise en demeure, le ministère de la Culture exige que la Société Alzheimer procède rapidement à la sécurisation du Château Beauce. Parmi les demandes figurent la fermeture des portes et fenêtres pour empêcher les intrusions, l’installation d’un système d’alarme et de surveillance, ainsi que le maintien d’un chauffage minimal de 10 degrés Celsius. L’organisme doit également retirer tout contenu combustible encore présent dans le bâtiment et rétablir une alimentation électrique sécurisée.
« Depuis quatre ans, on est en mode ping-pong avec le ministère. Le bâtiment se détériore rapidement. (...) Nous avons demandé un plan de match, mais il n’est jamais venu. Nous avons offert de nous impliquer, mais nous n’avons pas eu de réponse. Nous avons sollicité une rencontre avec le ministre quatre fois, et quatre fois nous avons reçu une fin de non-recevoir. Cette façon de faire là est inacceptable », a complété Sonia Nadeau.
Un conflit qui détourne l'organisme de ses missions
L’organisme dénonce également l’impact de ces contraintes sur ses ressources humaines et financières, affirmant qu’elles détournent l’attention de son objectif principal : accompagner les personnes atteintes d’Alzheimer et leurs familles. « Nous sommes ici pour nos bénéficiaires et leurs proches, pas pour rénover un bâtiment », a insisté Sonia Nadeau.
Le ministère de la Culture, dans un avis antérieur daté du 15 novembre, avait rappelé que les aides financières octroyées étaient exceptionnelles et ne seraient pas renouvelées. En réponse, la SACA soutient que ces fonds sont insuffisants pour répondre aux exigences du ministère, tout en maintenant ses activités courantes.
Outre les dégâts causés par les inondations, le bâtiment subit également des dégradations liées à des intrusions répétées, accentuant les coûts de sécurisation. De son côté, le maire de Sainte-Marie, Gaétan Vachon, présent pour l'occasion, a regretté cette situation la qualifiant « d'aberrante pour un organisme à but non lucratif ».
Le Château Beauce : un cadeau empoisonné
Pour rappel, l’histoire du Château Beauce remonte à 2014, lorsque la Société Alzheimer Chaudière-Appalaches acquiert le bâtiment de la communauté des Sœurs oblates de Béthanie pour une somme symbolique.
À l’époque, l’organisme envisage d’y déménager ses bureaux et de créer un milieu de vie pour les personnes atteintes de troubles neurocognitifs. Cependant, au fil des années, des évaluations révèlent des problèmes structurels majeurs qui rendent ce projet impraticable.
Cette situation s’est compliquée davantage en 2018 lorsque le ministère de la Culture classe le Château Beauce comme bâtiment patrimonial. Cette décision complique les projets de la SACA, qui avait trouvé un acheteur potentiel. Le classement fait fuir l’acquéreur et transforme le bâtiment en un poids financier important pour l’organisme. « Si on avait su que le bâtiment serait classé, on ne l’aurait pas pris », a admis Sonia Nadeau.
Un an plus tard, en 2019, les inondations majeures qui frappent Sainte-Marie aggravent la situation. Avec cinq à six pieds d’eau dans le sous-sol, les dégâts sont considérables : des chambres, une cuisine et le système de chauffage électrique sont entièrement détruits. Le coût des réparations s’ajoute au fardeau déjà imposé par le statut patrimonial et la localisation du bâtiment en zone inondable.
Entre 2021 et 2024, le ministère de la Culture tente d’aider l’organisme en accordant deux aides financières totalisant 100 000 $. Cependant, ces fonds s’avèrent insuffisants pour couvrir les frais élevés de gestion et de réparation. La localisation du Château Beauce, en zone inondable, combinée à son statut patrimonial, rend la vente pratiquement impossible.
En franchissant la porte du Château Beauce aujourd'hui, il est difficile de ne pas remarquer à quel point les dégâts causés par l’humidité, les inondations et les nombreux actes de vandalisme contrastent avec la beauté de la bâtisse et ce qu’elle a pu être autrefois.
Face aux exigences du ministère, la SACA se retrouve dans une impasse. Tout en exprimant son souhait de résoudre ce conflit à court terme, elle insiste sur la nécessité de recentrer ses efforts sur ses bénéficiaires.
L'organisme a également lancé une campagne de soutien sous la forme d'une pétition, afin de demander l'appuie de la population. Les personnes intéressées peuvent aller consulter cette dernière en se rendant sur www.change.org/sociétéalzheimerchaudiereappalaches.
1 commentaires
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Quand les fonctionnaires du ministère de la Culture s’introduisent dans un dossier, c’est la catastrophe.
On a vu où a mené le destin du Manoir Taschereau...
Drôle de comportement. Envoyer des mises en demeure et des procédures à un organisme de bénévolat…