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Claude-Félix Pomerleau, machiniste-artisan à Saint-Benoît-Labre
Claude-Félix Pomerleau est un machiniste-artisan installé à Saint-Benoît-Labre spécialisé dans la conception d'objets d’art et d’urnes funéraires.
Formé comme machiniste il y a environ 40 ans, Claude-Félix Pomerleau a passé la majeure partie de sa vie à pratiquer ce métier. Cependant, après être tombé malade et avoir dû cesser de travailler pendant un long moment, il profite de ce repos forcé pour se consacrer à un projet de longue date : concevoir son propre jeu d’échecs.
« C’était en 2006. J’ai commencé par le dessiner et puis je l’ai usiné. Après ça j’ai continué de faire mes propres créations », a-t-il indiqué lors de notre entrevue.
Ainsi, il est devenu machiniste-artisan et n’est jamais retourné travailler dans une autre entreprise.
Le métier
D’après l’artisan, le métier de machiniste est quasiment aussi vieux que le forgeron, bien qu’il soit arrivé après lui dans l’histoire. « Justement, Félix, mon nom, était aussi le nom de mon parrain qui a été forgeron à Notre-Dame. »
« J'utilise les métaux non ferreux, c’est-à-dire l’aluminium, l’or, le laiton et le cuivre. D’ailleurs, le cuivre est le premier matériau que l'humain a été capable de travailler. »
Claude-Félix se questionne sur l’avenir de l’usinage conventionnel, car il faut noter qu’il n’utilise aucune technologie numérique.
« C’est un vieux métier, mais on dirait que les jeunes ne sont plus intéressés par ça. Maintenant, tout se fait avec des machines numériques et bientôt cela pourrait être remplacé par l’imprimante 3D. Peut-être même qu’un jour l’art sera dessiné par ordinateur et imprimé en trois dimensions. On pourra se demander si c’est encore de l’art… Mais pour moi oui, car juste le fait de penser à quelque chose qui n’existe pas c’est de l’art. »
Pour promouvoir sa passion, il faisait habituellement une dizaine d’expositions et de salons par année. Mais en raison de la pandémie, beaucoup d’évènements ont été annulés et sa boutique n’a pas beaucoup tourné.
Cet artisan qui a lancé sa boutique en 2019, dispose de plusieurs petites machines qui lui permettent de créer de nombreuses pièces : une fraiseuse, un tour, un rouleau, une petite presse, une soudeuse, une perceuse, etc. « Je voulais mon équipement depuis longtemps pour faire mes petites choses. »
Lorsqu’on lui demande combien de temps ça prend pour faire une pièce, il répond 25 ans. « Moi ça m’a pris 25 ans pour en arriver là. Ça ne fait pas longtemps que je suis dans ce domaine, seulement 10-15 ans. Je suis un artiste autodidacte, je n’ai aucune formation en art. »
Les urnes funéraires
La conception des urnes funéraires est certes, une spécialisation peu commune, mais essentielle selon Claude-Félix Pomerleau.
« Un jour, j'ai dû me rendre au centre funéraire afin d’acheter une urne pour un proche. J’ai vraiment été surpris, le prix que ça coûte, ça n’a pas d’allure ! Alors je me suis dit que j’allais en faire moi-même et que je les vendrais directement aux particuliers. J’aime mieux les faire ici, en faire moins, mais les rendre plus accessibles. »
Il design et usine des urnes en laiton et en aluminium. Depuis quelques mois, cet artiste a créé un nouveau modèle avec du cuivre roulé et de la machinerie. « Le cuivre devient plus foncé avec le temps, le laiton aussi, ça fait changer les couleurs. »
Il crée aussi des petites urnes pour les animaux de compagnie. L’une d’entre elles par exemple a un couvercle représentant une trace de patte. Il est évidemment possible de l’enterrer complètement, mais aussi de laisser la plaque avec la trace sur le dessus de la terre, au niveau du gazon.
« J’aurais voulu percer dans ce marché, mais il est assez fermé et tabou. Quand je fais une exposition ou un salon, il y en a qui ont presque peur, car ils ne sont pas près à ça (la mort) ou d’autres sont surpris plus positivement en découvrant qu’on en trouve ailleurs que dans les funérariums. »
Les fleurs
« Comme je fabrique des urnes, on me demandait souvent des fleurs pour les mettre sur les pierres tombales, c’est plus durable que des fleurs classiques. Alors je me suis lancé et j’ai même fait un concours d'entrepreneuriat pour ce projet-là. »
Lorsque Claude-Félix crée une rose, entièrement à la main, cela lui prend environ deux heures. Il commence par découper les pétales avec un patron dans une feuille de cuivre, au ciseau. Pour faire une seule fleur, il y a trois formats de pétales, des grosses, des moyennes et des petites. « Ça a l’air simple de voir un patron de même, mais le temps de le développer et d’ajuster la technique, ça prend plusieurs essais ! Il y a beaucoup d'ouvrages derrière. J'ai dû en faire une dizaine avant d'arriver au bon résultat. »
Ensuite, il fait un trou au milieu des trois ensemble de pétales avec un poinçon qu’il a usiné lui-même et perce d’un coup de marteau sec.
« Dans toutes mes œuvres, il y a toujours une partie machinée. Ici, c’est la petite partie qui permet de tout assembler, les pétales à la tige. »
Pour une rose créée en barbelé et en aluminium, la pièce usinée permet d’assembler l'aluminium des pétales à l’acier de la tige en barbelé, car ces deux matériaux ne peuvent se souder ensemble.
Un coeur d’artiste
« Je fais aussi beaucoup de trophées pour des événements, pour un tournoi de scrabble provincial par exemple, pour les designers du Québec à Montréal en 2019, ou encore le gala de distinction jeunesse du CJE, mais il n’existe plus aujourd’hui. »
Il produit également des sculptures, des portes-bijoux, des objets décoratifs, des girouettes, etc. « Je fais des commandes et je vends aussi mes créations que je fais selon mes inspirations. »
Ce machiniste-artisan aime travailler à partir d’objets recyclés. « J’ai récupéré récemment un vieux poêle à bois des forges de Saint-Maurice, avec comme des pattes de lions. J'aimerais peut-être en faire une table. Il y a aussi un banc que j’ai travaillé à partir d’une vieille poutre de maison datée de 1897, c’est une pièce unique. »
Enfin, pour un appel de dossier à Beauce art, Claude-Félix Pomerleau a créé une œuvre intitulée « Projeter l’histoire ». Sur l’idée d’un projecteur super 8, l’artiste a fabriqué l’ensemble de la machine de projection et a demandé à Alain Lapierre (un autre artiste de Saint-Benoît) de lui dessiner quatre éléments de l’histoire de Saint-Georges : l’ancien pont de fer près de l’église, le dragon, les inondations et les Amérindiens. Ainsi, chacun des quatre dessins correspondait à une image à projeter.
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2 commentaires
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Vos réalisations sont magnifiques!
Beau travail. J'adore.