Pier Dutil
Humble jusque dans la mort

Par Pier Dutil
Le décès du pape François, né Jorge Mario Bergoglio, le lundi de Pâques en a surpris plusieurs. On le savait malade, mais sa sortie sur la place Saint-Pierre le jour de Pâques nous avait laissé croire que sa convalescence se déroulait bien.
Dans les jours qui ont suivi son décès, le dévoilement de son testament et de ses volontés concernant les cérémonies entourant ses funérailles et son inhumation ont révélé un personnage humble jusque dans la mort.
Un pape différent
Comme presque tous les gens de ma génération, j’ai été baptisé dans la religion catholique dès ma naissance, sans mon consentement. C’était la façon de faire à l’époque et je n’en ai jamais tenu rigueur à mes parents.
Mais, à mesure que je vieillissais, je dois avouer que j’ai mis la pédale douce sur ma pratique, m’éloignant peu à peu de l’Église catholique, la plus vieille institution humaine toujours en place.
Malgré cela, l’élection en 2013 de François comme 266e pape m’a interpellé. Ce jésuite, premier pape à provenir de l’Amérique du Sud (Argentine) et premier pape non-européen en 1300 ans, était relativement peu connu. Dès sa nomination, ses premiers gestes m’ont indiqué que ce pape serait différent de ses prédécesseurs.
Il s’est présenté avec sa soutane blanche refusant de porter d’autres ornements, il a refusé d’utiliser les appartements spacieux du palais épiscopal pour se contenter d’un petit deux pièces de la résidence Sainte-Marthe, un hôtel sur le territoire du Vatican, et il a opté pour une Fiat Mini pour ses déplacements plutôt que d’utiliser la limousine habituelle réservée au pape.
Par ces petits gestes, François venait d’indiquer clairement que sa papauté serait celle de quelqu’un qui ferait preuve d’humilité.
Même dans la mort, François a fait preuve d’humilité, souhaitant être inhumé dans un cercueil en bois sans artifice à la basilique Sainte-Marie-Majeure devenant ainsi le premier pape depuis 1639 à ne pas être inhumé à la basilique Saint-Pierre.
Un mandat dérangeant
Au sein de l’Église catholique et surtout auprès de ses hauts dirigeants, l’attitude de François dérangeait. Il s’est attaqué à la réforme de la Curie romaine, ébranlant ainsi la hiérarchie.
Au sujet de l’homosexualité, il en a surpris plusieurs lorsqu’il a déclaré : «Qui suis-je pour juger?» Il s’est même rendu jusqu’à suggérer aux prêtres de bénir les unions de couples de même sexe sans toutefois célébrer leurs mariages.
Il a aussi fait preuve d’une certaine ouverture sur la place des femmes, modifiant les règles des synodes pour permettre d’y accueillir des femmes. On est encore loin de l’ordination des femmes.
Au sein d’une institution sclérosée et misogyne comme l’Église catholique, ces changements n’étaient pas appréciés par les traditionnalistes, certains n’hésitant pas à manifester leur insatisfaction.
François a effectué de nombreux voyages au sein même de pays où la religion catholique n’était pas dominante. Il a sermonné les dirigeants politiques en s’opposant aux guerres, en les incitant à faire preuve d’accueil auprès des réfugiés et en les sensibilisant aux changements climatiques qui menacent la planète pour ne citer que ces cas.
Sa dernière visite au Canada en 2022 pour venir présenter ses excuses au nom de l’Église au sujet du sort réservé aux Autochtones, notamment celui des enfants dans les pensionnats, aura permis d’amorcer une certaine réconciliation.
Au cours de son règne de 13 ans, François a fait preuve d’un respect sans faille du message du Christ davantage tourné vers les pauvres et les plus vulnérables. Ses prédécesseurs ne nous avaient pas habitués à cela.
Qui lui succédera?
Au cours des prochaines semaines, les cardinaux devront élire le successeur de François dans le cadre d’un conclave dont le rituel date du Moyen-Âge.
Sur les 252 cardinaux actuels, 135, âgés de moins de 80 ans, dont quatre Canadiens, auront droit de vote. Ils seront isolés dans la chapelle Sixtine où se tiendront jusqu’à quatre scrutins par jour jusqu’à ce qu’un candidat obtienne les 2/3 des votes plus un. Après 10 jours, si on n’est pas parvenu à un choix, un gagnant pourra être élu avec une majorité de 50 % plus un.
Cette façon de choisir le pape de l’Église catholique n’est pas un exemple de démocratie. En effet, seulement 135 personnes ont droit de vote alors qu’il y a 1,4. milliard de catholiques sur la planète.
Est-ce que les cardinaux choisiront un pape qui poursuivra la tendance réformiste de François ou préfèreront-ils un traditionnaliste? Assisterons-nous au retour des Italiens qui ont dirigé le Vatican durant des siècles, jusqu’en 1978, lors de l’arrivée de Jean-Paul II, un Polonais? Personne ne le sait.
Chose certaine, le nouveau pape devra faire preuve d’ouverture parce qu’en Occident, les églises se vident. Présentement, une majorité de catholiques se retrouve en Amérique du Sud et en Afrique.
Courage
Il reste encore 1372 jours au mandat de Donald Trump.
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Pensée de la semaine
Je dédie la pensée de la semaine aux 135 cardinaux qui participeront au prochain conclave :
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