Pier Dutil
«Rien ne va plus, les jeux sont faits»

Par Pier Dutil
Si vous avez déjà mis les pieds dans un casino et avez circulé à travers les tables de jeu, vous avez sans doute entendu cette phrase. Mais, aujourd’hui, les tables de jeu sont remplacées par la campagne électorale canadienne.
L’arrivée de Mark Carney
Alors que le parti libéral du Canada (PLC) nous conviait à une course à la chefferie pour trouver le successeur de Justin Trudeau, nous avons plutôt assisté à un couronnement.
Un adage dit :«À vaincre sans péril on triomphe sans gloire.» Pour le nouveau chef libéral, la lutte a été facile et il faut reconnaître qu’elle était menée au sein d’un parti qui avait hâte de trouver un successeur à Justin Trudeau dont l’impopularité semblait réserver une véritable débâcle à son parti lors des prochaines élections.
En accaparant 85,9 % des votes, Mark Carney a obtenu un mandat clair, laissant loin dernière ses trois adversaires qui se sont avérés être de simples figurants.
Carney a vite imprimé sa marque lors de la composition de son cabinet réduit à 23 membres, alors que celui de Justin Trudeau en comptait 37.
Mais, maintenant, Mark Carney devra affronter des adversaires beaucoup plus féroces, notamment le chef conservateur Pierre Poilievre.
Un curriculum vitae bien garni
Alors que les Conservateurs menaient dans les sondages depuis près d’un an avec une avance de plus de 20 points sur les Libéraux de Justin Trudeau, Pierre Poilievre avait élaboré une stratégie qui se résumait à attaquer Justin Trudeau.
Mais, Trudeau n’est plus là. Le nouveau chef libéral jouit d’une excellente réputation dans les milieux financiers et son arrivée à la direction du PLC change la donne du tout au tout.
Mark Carney possède un curriculum vitae fort bien garni. Après des études dans de grandes universités reconnues mondialement comme Harvard et Oxford, il attire l’attention de Stephen Harper qui le nomme Gouverneur de la Banque du Canada. Faisant sa marque à ce poste, M. Carney attire également l’attention des dirigeants politiques britanniques qui l’invitent à devenir Gouverneur de la Banque d’Angleterre. Il sera le premier citoyen non-britannique à occuper cette fonction dans l’histoire de cette institution.
Mais, passer de grand banquier à politicien n’est pas une garantie de succès. Durant la campagne à la chefferie du PLC, on a pu découvrir un Mark Carney plutôt terne, peu flamboyant.
Une lutte serrée à venir
S’il était relativement facile de gagner l’appui des militants libéraux avides de se trouver un nouveau chef, la lutte sera plus difficile dans le cadre d’une campagne électorale où il faudra convaincre une majorité de Canadiennes et de Canadiens qui se préparaient à chasser du pouvoir les Libéraux.
Il faut reconnaitre que le bilan de Justin Trudeau ne passera pas à l’histoire pour ses bons coups, mais plutôt pour ses déficits astronomiques, la forte augmentation de la dette nationale et la perte de contrôle du dossier de l’immigration.
Mark Carney peut s’affranchir de ce mauvais bilan puisqu’il n’évoluait pas au sein de ce Gouvernement, mais les membres de son équipe ne peuvent en faire autant.
Pour l’instant, l’arrivée de Mark Carney à la direction du PLC semble avoir ravivé les troupes libérales. Alors que le parti tirait fortement de l’arrière dans les sondages au point de laisser entrevoir un Gouvernement conservateur majoritaire, tout est remis en question présentement.
Dans les plus récents sondages, le PLC et le PCC étaient au coude à coude. Même qu’un sondage Angus Reid dévoilé la semaine dernière plaçait le PLC à 42 %, une avance de cinq points sur le PCC, ce qui serait une marge suffisante pour donner un Gouvernement libéral majoritaire. Il semble que les électeurs canadiens en voulaient davantage à Justin Trudeau qu’à son parti. Plusieurs militants libéraux me confiaient il y a quelques semaines qu’ils s’apprêtaient à voter pour un autre parti, voire même à s’abstenir de voter. Voilà que plusieurs d’entre eux se disent maintenant disposés à rentrer dans le rang.
La campagne qui s’amorce sera une véritable lutte entre Conservateurs et Libéraux. Le NPD paiera cher son alliance avec les Libéraux pour les maintenir au pouvoir au cours des dernières années. Son chef, Jagmeet Singh, a perdu beaucoup de crédibilité au sein même de son parti et il y a fort à parier qu’il en sera à sa dernière élection en tant que chef. Quant au Bloc québécois, lui aussi y perd beaucoup suite à l’arrivée du nouveau chef libéral.
Il y a un cliché qui dit qu’en politique, une semaine ou un mois, ça représente une éternité. La situation que nous vivons présentement en fournit une preuve évidente.
L’éléphant dans la pièce
L’élection ne pourra échapper à la présence d’un énorme éléphant dans la pièce, à savoir l’imprévisible Donald Trump et ses multiples menaces.
Il est certain que ce sujet dominera la campagne électorale, mais il ne faudrait pas oublier pour autant les sujets internes comme le retour à l’équilibre budgétaire, le développement de nouveaux marchés pour nos entreprises, l’accroissement de la productivité, un meilleur contrôle de l’immigration, etc.
Le prochain premier ministre devra également faire preuve de tact et d’autorité pour s’assurer d’adopter une stratégie respectée par toutes les provinces pour affronter les lubies de Donald Trump. Des initiatives, comme celle du premier ministre ontarien Doug Ford la semaine dernière, risquent de diviser le pays et ainsi faire jouir le monarque de la Maison Blanche qui est devenu un virtuose dans l’art de diviser pour régner.
Et en Beauce?
Le retrait du Député conservateur sortant, Richard Lehoux, à peine deux jours avant le déclenchement de l’élection, a pris tout le monde par surprise. Qui lui succédera?
Je me hasarde à avancer un nom : Jonathan Poulin, le candidat conservateur dans Beauce-Sud lors de la dernière élection au Québec en 2022. Poulin avait donné la frousse à Samuel Poulin réduisant sa majorité à seulement 428 voix.
Pourquoi Jonathan Poulin? Parce que ce dernier, lors d’une entrevue sur les ondes de COOL-FM en mars 2024, avait déclaré être intéressé par une éventuelle candidature au fédéral pour les Conservateurs.
Au moment de rédiger cette chronique, trois candidats sont confirmés en Beauce : le chef du Parti populaire du Canada, Maxime Bernier, le candidat du Bloc québécois, Gaétan Mathieu et une illustre inconnue pour le parti libéral, Maryelle-Henriette Doumbia, une candidate qui sort d’on ne sait où et que l’on qualifie de «poteau» dans le jargon politique.
Courage
Il reste encore 1 405 jours au mandat de Donald Trump.
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Pensée de la semaine
À l’aube de cette élection, je dédie la pensée de la semaine aux électrices et aux électeurs canadiens :
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