Aujourd'hui, on l'appellerait plutôt le Salon de billard Chez Ben, mais j'ai préféré utiliser la terminologie d'autrefois, pour nous replonger davantage dans l'ambiance particulière de cette belle époque. C'était dans l'ancien secteur commercial de ce côté de la rivière, pas très loin au sud de l'église. Le restaurant Chez Ben était juste en face de la librairie de Louis-Bertrand Poulin, et voisin du barbier Fortier.
Ce bâtiment existe depuis très longtemps, il y eut auparavant un magasin-restaurant qui appartenait à Albert Veilleux. C'est en 1953 que Benoit Bolduc s'en porta acquéreur. La 1re photo date des environs de 1960, on y voit la façade. J'aurais bien aimé en mettre une de meilleure qualité, mais c'est la seule que j'ai pu trouver. Il y avait à l'époque deux grands bancs devant les vitrines, beaucoup s'y assoyaient pour jaser pendant l'été. Et remarquez à droite, la chaise du cireur de chaussures qui fut en usage pendant plusieurs années. Pendant l'hiver, on la rentrait en-dedans, près de la table de snooker. Les cireurs que j'ai connus furent Réginald Roy, Richard Bureau et Jeannot Roy.
Lorsque j'ai commencé à fréquenter cet endroit, en 1959, il y avait trois tables de billard, soit deux tables de pool et une grande table de snooker et de skittle. À l'avant, près des fenêtres, il y avait deux tables à cartes très populaires. Il y avait sur le côté nord un grand comptoir-lunch bordé d'une rangée de tabourets pivotants sur lesquels s'assoyaient en priorité ceux qui désiraient manger. Ce n'était pas vraiment un restaurant mais plutôt un comptoir-lunch comme commodité complémentaire pour les clients qui jouaient au billard et ceux qui allaient les voir jouer. On y servait surtout des hot-dog, des hamburgers et des sandwichs. Il y avait aussi des machines à boule et, à une certaine époque, un appareil à crème glacée molle. En 1960, on y installa une autre table de billard en face de la caisse enregistreuse.
Pendant les années où Benoit fut propriétaire, il y vendait aussi du tabac à pipe en feuilles qui attirait une clientèle importante de fumeurs plus âgés. L'une des journée les plus achalandées était le dimanche avant-midi, où l'endroit constituait le principal compétiteur des messes de 9h30 et de 11h. Tenancier d'un tel établissement requérait environ 10 à 12 heures de travail par jour, ce qui devenait éreintant à la longue. Alors, le propriétaire Benoit Bolduc allait arrondir ses revenus tout en prenant du repos à chaque année au cours de l'été lorsqu'il faisait la «run du tabac» et celle des pommes. Je l'ai accompagné pendant cinq ans au tabac en Ontario, où Benoit était «kiln hanger» (accrocheur de bâtons de tabac) dans les bâtiments de séchage tandis que j'étais «primer» (cueilleur de feuilles de tabac). Je l'ai fait de 1966 à 1970 pour payer mes études universitaires, mon père étant décédé en 1967.
La 2e photo, vers 1954, nous présente Benoit tout souriant près des installations servant à préparer les aliments servis à son établissement. La 3e photo est une publicité qui a paru dans le journal local à Noël 1968. Sur la 4e photo, des amateurs de billard autour de la table, vers 1950, à l'époque où ce commerce appartenait à Albert Veilleux. C'est d'ailleurs son fils Grégoire Veilleux qu'on voit derrière le comptoir vers la fin des années '40 à la 5e photo.
Benoit Bolduc vendit son commerce de billard en 1980 à M. Gaétan Doyon qui l'a eu jusqu'en 1986. D'autres propriétaires se succédèrent par la suite. Aujourd'hui, l'immeuble est un édifice à appartements depuis environ 25 ans.
Photo 1 du fonds Normand De Lessard. Photos 2 et 4 du fonds Gilbert Gamache. Photo 3 du fonds Éclaireur-Progrès. Photo 5 du fonds Claude Loubier. Texte et recherches de Pierre Morin.
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