Réforme de la Loi 101
La fondamentale langue française
J'ai terminé la couverture de la conférence de presse de jeudi dernier du premier ministre François Legault, et de son ministre de la Justice et procureur général du Québec et ministre responsable de la Langue française, Simon Jolin-Barrette — qui ont présenté le projet de Loi 96 pour réformer la Charte de la langue française, avec un sentiment de déception.
Même si d'entrée de jeu, M. Legault s'est déclaré « très ému » par l'annonce, je n'ai aucunement senti qu'il s'agissait d'une fervente affirmation que la langue française représentait le coeur de l'existence du peuple québécois. Vraiment le coeur n'y était justement pas!
J'ai plutôt eu l'impression que les deux hommes étaient en mode carboneutre pour réduire au strict minimum les émissions négatives dans l'environnement linguistique. Cela s'est confirmé lorsqu'ils ont qualifié le projet de loi de « raisonnable. »
Raisonnable? Le gouvernement Legault souhaite que ce soit la perception de la communauté anglophone et du ROC (Rest of Canada) envers le projet présenté jeudi afin ne pas faire de vagues au pays.
Mais au contraire, pour marquer le coup d'affirmation, François Legault devrait pourtant rédiger uniquement en français la lettre qu'il entend envoyer à ses homologues provinciaux et au premier ministre Trudeau, Mais comme il le dit si bien, ce ne serait pas « raisonnable. »
Dans cette missive, il va plutôt leur « expliquer » la démarche de réforme, comme pour s'excuser presque de réaffirmer cet élément fondamental de l'existence de la nation québécoise.
Aussi, le ministre Jolin-Barrette a répété à maintes reprises, durant la conférence de presse, que les droits de la communauté anglophone seraient maintenus et respectés.
Il offre à l'avance des échappatoires à la Loi, comme pour les municipalités qui ont perdu, en raison des changements démographiques, leur statut bilingue et de le conserver par simple adoption d'une résolution!
Vraiment, le transfert linguistique tant souhaité par le gouvernement, qui est essentiel à la survie du français, selon ses propres dires, ne sera pas encouragé avec de telles mesures.
Jeudi, sur un ton recto-tono, le ministre responsable de la Charte de la langue française m'apparaissait contrit et presque accablé de présenter ce document législatif sur lequel il planche pourtant depuis des mois.
Et pour éviter la répétition des protestations de la Loi 21, Québec va se prévaloir, dès le départ, de la clause dérogatoire pour soustraire la nouvelle loi à toute velléité de contestation judiciaire. C'est son plein droit et dans ce cas-ci, la démarche de réforme risque de moins s'enrayer.
Par contre, on pourrait assister à un confrontation entre Ottawa et Québec alors que le fédéral est aussi en pleine réforme de la Loi sur les langues officielles, suite au dépôt en février d'un livre blanc par la ministre Mélanie Joly.
Cette dernière vise l’atteinte d’une égalité «réelle» des deux langues alors que l'objectif du ministre Jolin-Barrette est de consacrer le français en tant que seule langue officielle et langue commune au Québec. Des positions pratiquement irréconciliables.
Les autres défis envers la langue française
S'il faut reconnaître que bon nombre des enjeux sur l'avenir du français au Québec se déroulent sur la scène de la grande région montréalaise, il en demeure pas moins qu'il y a des défis tout aussi importants et vitaux pour l'ensemble de la province.
Regardons la simple maîtrise de la langue.
En 2021, 20 % des Québécoises et des Québécois sont analphabètes et 35 % éprouvent de grandes difficultés de lecture et d'écriture, que l'on désigne comme « analphabètes fonctionnels. »
De même, du secondaire à l'université, on entend le même soupir de découragement quand on parle du degré de maîtrise de la langue des élèves.
Ainsi, malgré le fait que la majorité des cégépiens satisfassent aux conditions de réussite de leur ordre d'enseignement, plusieurs enseignants universitaires estiment qu'un assez grand nombre d'élèves ne possèdent pas, à la fin de leur études collégiales, le niveau de compétence linguistique requis pour réussir leurs études universitaires.
Ces carences linguistiques, qui ne sont que deux situations parmi d'autres, trouvent leur pleine expression de nos jours sur la plateforme des médias sociaux, comme Facebook, qui sont devenus le moyen premier d'échange d'informations, d'idées et de points de vue entre les individus.
Très souvent, le français utilisé dans les partages et les commentaires est, pour être poli, rudimentaire. réduit à une écriture phonétique quasiment hiéroglyphique et appuyé par des émoticônes d'aubergine et de tas de merde souriants...
Si la francisation des nouveaux arrivants au Québec est d'une importance capitale pour l'avenir de notre langue commune, les efforts doivent être tout aussi intenses pour les autres secteurs de notre société.
Le ministre Jolin-Barrette a mentionné, lors du point de presse, que le qualité du français au Québec était « un défi » mais il n'a pas indiqué comment il entendait le relever.
Bref, j'aurais préféré que le projet de Loi 96 soit «résonnable», (un qualificatif que je viens d'inventer pour l'exercice de ce billet) afin que la fameuse « promotion » du français, tant désirée par François Legault, puisse s'incarner davantage.
En terminant ce billet, qui n'a de court que son titre, je demande formellement au niveau ministère de la langue française qui verra le jour, de corriger la faute qui nous explose au visage depuis maintenant plus d'un an en restituant le «s» à l'adjectif «scolaire» dans l'appellation «Centre de services scolaires ».
C'est une question de respect, ici, d'une simple règle grammaticale. Pour cela, on a pas besoin de faire de réforme.
5 commentaires
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Depuis le temps qu on en entend parler du problème de la langue. Je fais le tour de la province depuis des années, l anglais n a jamais prédominé, ni au sud au nord à l ouest et à l est . Le problème a toujours été Montréalais.
Une seule solution: tous les jeunes étudiants étrangers doivent fréquenter l école française jusqu au secondaire 5
Mais l anglais devrait être enseigné à tous les étudiants francophones, faut quand même s ouvrir au reste du monde
Le vieux fond péquiste de la CAQ ressort. Pas certain que l’on ait à rebrasser cette soupe.
Ça excite le nationalisme.
On devrait commencer par bien parler le français. Si je me souviens bien, c’est Boileau qui disait : Un peuple qui parle bien sa langue, c’est comme s’il tenait la clef de sa prison.
Que l’on pense à la négation « Za » « Vous zavez pas » ou à la populaire formule « 3.1416 » « Pi ». « Pi, vous zavez pas compris…! »
On se referme sur le P’tit Kebec, on oublie qu’il y a autant de gens qui parlent français partout au Canada. Tout l’Est de l’Ontario, aussi, il y a des communautés francophones au Manitoba, Saskatchewan, Vancouver, Moncton, Halifax et même à Terre-Neuve.
On ne s’occupe pas de supporter les communautés francophones ailleurs au Canada. On les laisse se débrouiller par elles-mêmes.
Au lieu d’aller vers ces autres communautés francophones pour les aider et profiter de leurs appuis, on se replie sur soi…
Il y a eu Benoît Pelletier, le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes et de la francophonie canadienne, sous le gouvernement de Jean Charest, qui a tenté d’établir des relations avec les communautés francophones ailleurs au Canada, mais il n’a jamais été appuyé par les Péquistes ou les Caquistes.
Lors d’un dernier voyage en Europe, au Portugal en octobre 2019, la seule langue par laquelle on pouvait se faire comprendre était l’anglais. Je ne crois pas que le portugais soit en danger parce que tout le monde parle un peu anglais.
C’est partout pareil dans le monde. On peut se faire comprendre en anglais en Russie, au Pérou ou à Singapour…
En ajoutant des embarras à la loi, les entreprises qui ne voudront pas s’enfarger dans les procédures administratives et les lois, vont aller s’installer à Hawkesbury de l’autre côté de la rivière, c’est déjà commencé.
Ils devraient, de plus, partager nos valeurs de laïcité et d’égalité homme-femme.
Ceux qui veulent vivre en anglais ont 12 provinces et territoires pour satisfaire leurs désirs, ainsi que les 50 États américains.
Le moindre des respects de la part du Gouvernement fédéral serait d’avoir un ministre de l’immigration parfaitement bilingue, au lieu d’un ministre unilingue anglophone.