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Une relation tendue «à la croisée des chemins» entre Via Rail et le CN

durée 18h14
26 novembre 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Les documents appuyant la tentative de Via Rail d'obtenir un meilleur accès aux voies ferrées appartenant à la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) jettent un nouvel éclairage sur une relation de plus en plus tendue entre les deux groupes.

La société d'État tente de revoir son contrat avec le CN depuis des années, demandant finalement à l'organisme de réglementation des transports du pays en 2023 d'imposer une nouvelle entente d'accès aux voies ferrées qui placerait leur relation sur des bases équitables.

Dans une requête à l'Office des transports du Canada, Via Rail a proposé des changements qui aideraient à augmenter le nombre de trains sur son corridor clé Québec-Windsor, à améliorer sa faible performance en matière de ponctualité et à payer des tarifs plus «raisonnables» au CN.

La demande n'a pas porté ses fruits depuis qu'elle a été déposée il y a 18 mois, en partie à cause d'un retard procédural lié à la réponse du CN. Une demande de confidentialité sur certains documents est toujours à l'étude, de sorte que la soumission du CN n'est pas accessible au public.

Un «client captif»

La grande majorité des trains de Via Rail circulent sur des voies appartenant au CN, et la société d'État paie pour y accéder. Via Rail prévient que son statut de «client captif» et la «position quasi monopolistique» du CN signifient que le plus grand chemin de fer du pays peut donner la priorité à ses propres locomotives plutôt qu’aux trains de passagers.

Selon le dossier, il s'agit de loin de la cause la plus importante des retards de train subis par Via Rail sur l’infrastructure du CN.

Entre-temps, des itinéraires de marchandises plus fréquentés, des trains plus longs – qui se déplacent également plus lentement – et un espace limité sur les voies signifient que Via Rail est confrontée à des limites strictes quant à sa capacité à augmenter le volume de voyages et à amener les passagers au terminal à temps.

Via Rail affirme qu’il y a plusieurs décennies, le train Montréal-Toronto pouvait faire le trajet en quatre heures. En 2022, l'itinéraire a duré cinq heures et 33 minutes en moyenne, soit près d’une demi-heure de plus qu’en 2014.

Des retards similaires se sont produits sur d’autres trajets entre Québec et Windsor, en Ontario. Le pourcentage global de ponctualité de Via Rail dans le corridor est passé de 84 % en 2011 à un creux historique de 56 % en 2022, selon le dossier.

Dans une déclaration écrite, le CN a affirmé qu'il se conformait pleinement à son dernier accord avec Via Rail, qui ne comprend aucune disposition sur les déplacements rapides.

«Le conflit en cours est le résultat de la recherche par Via Rail d'une meilleure performance à moindre coût pour elle, avec des coûts accrus pour le CN pour entretenir ces voies dédiées afin de répondre à ses besoins en matière de transport ferroviaire de passagers», a affirmé la porte-parole Ashley Michnowski dans un courriel.

«Le CN reconnaît l'importance des services aux passagers et continue de soutenir le développement d'infrastructures ferroviaires dédiées qui répondraient à ces besoins tout en préservant la capacité des chemins de fer de marchandises à soutenir les besoins croissants de l'économie canadienne.»

Greg Gormick, qui dirige On Track Consulting, affirme que les tensions entre les deux entreprises sont naturelles compte tenu de leurs priorités concurrentes et de la quantité limitée de voies.

«Il y a toujours des problèmes lorsque vous mélangez les marchandises et les passagers», a-t-il soutenu.

Cependant, l'amélioration du service a souvent un coût, a-t-il ajouté.

«Lorsqu'Amtrak et ses partenaires étatiques veulent des améliorations, ils doivent les payer», a souligné M. Gormick, faisant référence à l'homologue ferroviaire de Via Rail pour les passagers aux États-Unis.

«Quelqu'un doit négocier cela. Il faut un accord de paix, mais il faut une autorité supérieure pour le faire.»

L'impasse témoigne de frictions de longue date entre les deux parties, potentiellement aggravées par de nouveaux différends. Plus tôt ce mois-ci, Via Rail a intenté une poursuite devant la Cour fédérale contre le CN au sujet des restrictions de vitesse qui affectent les nouveaux trains de passagers.

Pas les mêmes exigences pour le fret et les passagers

Jusqu’à présent, le processus s’est déroulé à huis clos. Il a fait suite à de longues négociations et à huit prolongations temporaires du contrat, qui a expiré en 2018.

Terry Johnson, président du groupe de défense des droits Transport Action Canada, a présenté la demande de Via Rail comme une contre-mesure de dernier recours aux tentatives du CN de négocier une «dégradation importante» du niveau de service de Via Rail — le terme fait généralement référence à la vitesse des trains et au volume de déplacements.

«Via Rail dépend énormément du CN, a-t-il déclaré. Cela crée une relation compliquée, qui n'est pas vraiment propice à un contrat commercial.»

Via Rail affirme que l'argent que le CN lui facture pour l'accès aux voies a des rendements décroissants pour le service aux passagers, le chemin de fer de marchandises étant moins incité que son partenaire à maintenir les voies en parfait état. Pour atteindre leurs vitesses plus grandes, qui peuvent dépasser 150 km/h, les trains de passagers doivent circuler sur des itinéraires entretenus selon des normes plus élevées que celles requises pour les trains de marchandises plus lents.

«Via Rail et le CN sont maintenant à la croisée des chemins dans leur relation», a déclaré la société d'État.

Entreprise dans cette dépêche: (TSX : CNR)

Christopher Reynolds, La Presse Canadienne