Nous joindre
X
Rechercher
Publicité

Santé Canada ne voit pas de risques dans un colorant alimentaire interdit par la FDA

durée 18h31
16 janvier 2025
La Presse Canadienne, 2024
durée

Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

TORONTO — Un colorant synthétique récemment banni de l'approvisionnement alimentaire aux États-Unis restera disponible au Canada, où Santé Canada a jugé qu'il ne présentait aucun risque pour la santé de la population générale.

Avec la dernière décision de la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis, le Canada se présente comme un cas à part en ce qui concerne l'additif alimentaire connu sous le nom de Red 3, dont l'utilisation dans les aliments est également limitée en Europe, en Australie et en Nouvelle-Zélande.

Joe Schwarcz, de l'Université McGill, a convenu avec Santé Canada que les preuves démontrant les préoccupations en matière de sécurité humaine sont insuffisantes, mais il aimerait néanmoins que le colorant soit interdit, car il affirme qu'il n'ajoute aucune valeur nutritionnelle tout en rendant les aliments ultra-transformés plus attrayants pour les consommateurs.

«La question importante est la suivante : lorsque vous ajoutez quelque chose à un aliment, ce doit être pour apporter un avantage quelconque, au-delà de rendre quelque chose plus attrayant», a déclaré M. Schwarcz, directeur de l'Organisation pour la science et la société de l’Université McGill.

Il a déclaré qu’il existe de nombreuses solutions de rechange naturelles sans l’ombre d’une crainte de toxicité, comme l’extrait de jus de betterave et les anthocyanes extraits de baies.

Également connu sous le nom d’érythrosine ou FD&C Red No. 3, le colorant est principalement utilisé dans les friandises, notamment les bonbons, les gâteaux, les biscuits et les glaçages, pour donner aux aliments et aux boissons une couleur rouge cerise.

La FDA a interdit le colorant en raison d’un risque de cancer, notant que deux études ont montré qu’il provoquait le cancer chez les rats de laboratoire avec un «mécanisme hormonal spécifique au rat» qui n’existe pas chez les humains.

Elle a indiqué que la mesure était une «question de droit», car une disposition légale l’oblige à interdire les additifs alimentaires reconnus comme causant le cancer chez les humains ou les animaux.

Plus d'études nécessaires

Waliul Khan, scientifique à l’Université McMaster, affirme que même si certains effets sur les rats ne se traduisent pas nécessairement chez l’humain, il estime utile de tenir compte des conclusions des études animales qui signalent des problèmes de sécurité potentiels pour les additifs qui peuvent être facilement évités.

«Alors qu’il existe de nouvelles preuves que cela est nocif – même chez les animaux – pourquoi allons-nous le garder dans notre alimentation ?», a soulevé M. Khan, professeur au département de pathologie et de médecine moléculaire.

M. Khan a dit qu’il aimerait voir une étiquette d’avertissement sur les aliments contenant des colorants synthétiques, exprimant également son inquiétude concernant le colorant rouge numéro 40, parfois étiqueté rouge allura.

Il a déclaré qu’une étude animale qu’il a publiée en 2022 a révélé que la consommation à long terme de rouge allura peut potentiellement déclencher des maladies inflammatoires de l’intestin.

«Lorsque nous en avons donné en continu à une souris pendant 12 semaines, cela a provoqué des effets nocifs dans l’intestin et a augmenté la gravité de la colite. Mais lorsque nous l’avons donné une fois par semaine, nous n’avons pas constaté cet effet grave», a expliqué M. Khan.

«Bien sûr, il devrait y avoir plus d’études, potentiellement, sur le sujet humain.»

Deux autres articles publiés en 2023 par des chercheurs de l'Université de Guelph ont examiné la façon dont certains colorants se décomposent dans l'intestin, et ont découvert qu'ils pourraient potentiellement entraîner des sous-produits toxiques.

La microbiologiste Emma Allen-Vercoe, qui a participé aux deux études, a dit dans un communiqué que les études appellent à une mise à jour de la réglementation pour tenir compte de la façon dont les composés sont métabolisés.

M. Khan a déclaré qu'il étudiait la sécurité d'autres colorants et qu'il espérait que l'attention accrue suscitée par l'interdiction du Red 3 par la FDA stimulerait le financement d'autres études. Il a souligné les difficultés liées au coût de la mise en place d'un essai avec un grand échantillon, ainsi que l'éthique de la tentative d'étude sur les humains d'une substance connue pour nuire aux animaux.

Deux cadres réglementaires différents

Santé Canada s'écarte également de la FDA en autorisant le Red 3 dans les cosmétiques - la FDA l'a interdit d'utilisation dans le maquillage en 1990 en raison d'une étude qui a révélé qu'il provoquait le cancer lorsqu'il était ingéré par des rats.

M. Schwarcz attribue cela à deux systèmes réglementaires très différents, insistant sur le fait qu'«il n'y a en fait aucune preuve qu'il constituerait un danger pour les humains».

Santé Canada a affirmé que si de nouvelles données scientifiques révèlent un risque pour la santé humaine lié à l'utilisation du colorant dans les aliments ou les médicaments, il prendrait des mesures, «y compris, si nécessaire, en ne permettant plus son utilisation comme colorant dans les aliments et les médicaments».

Il a décrit l'interdiction de la FDA comme une «exigence légale» déclenchée par les deux études sur les rats.

«Les études sur d'autres animaux et sur des humains n'ont pas montré ces effets, et les affirmations selon lesquelles l'utilisation de ce colorant dans les aliments met en danger la santé des personnes ne sont pas étayées par les preuves scientifiques disponibles», a-t-il précisé dans un communiqué envoyé par courriel, en début de soirée mercredi.

Santé Canada a déclaré avoir examiné une évaluation de la sécurité menée par un comité mixte des Nations unies et de l'Organisation mondiale de la santé en 2018. Le comité mixte ONU/OMS s'est attardé à des études portant sur des humains et des animaux et n'a trouvé aucun problème de sécurité pour le colorant en tant qu'additif alimentaire.

Cassandra Szklarski, La Presse Canadienne

app-store-badge google-play-badge