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Le Bloc défend la possibilité que Poilievre ait recours à la clause dérogatoire

durée 14h42
30 avril 2024
La Presse Canadienne, 2024
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3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

OTTAWA — Le Bloc québécois s'est porté mardi à la défense de Pierre Poilievre qui a laissé entendre la veille qu'il envisage de recourir à la disposition de dérogation afin de faire adopter des lois en matière de justice. Les libéraux, eux, se sont montrés grandement inquiets.

«La clause dérogatoire fait partie de la constitution canadienne et elle n'est pas exclusive aux provinces», a insisté le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, en mêlée de presse dans le foyer de la Chambre des communes.

Ainsi, bien qu'il se «médie d'à peu près tout ce que les conservateurs sont, disent, pensent et le contraire», M. Blanchet constate que «dans l'état de droit actuel, ils auraient la possibilité d'y recourir».

Dans un discours prononcé lundi devant l'Association canadienne des policiers, M. Poilievre a promis d'avoir recours à «tous les outils» constitutionnels à sa disposition afin d'adopter des réformes en matière de justice si son parti forme le prochain gouvernement à Ottawa.

M. Blanchet, qui défend bec et ongles le recours par le Québec à cette disposition permettant à un premier ministre qui l'invoque de soustraire une loi à tout recours judiciaire fondé sur certains droits inclus dans la Charte canadienne des droits et libertés, se frottait presque les mains.

«À quelque chose malheur est bon, a-t-il lancé en évoquant un éventuel gouvernement Poilievre. Si un gouvernement fédéral décidait de recourir à la clause dérogatoire, je vois mal comment un gouvernement fédéral, celui-là ou ultérieurement, pourrait reprocher aux provinces et au Québec de recourir à la clause dérogatoire.»

Chez les libéraux, on mettait mentalement les drapeaux en berne. «Ce n'est pas populaire parfois de défendre les droits protégés par la charte de certaines personnes, y compris ceux qui sont accusés de gestes criminels, mais c'est essentiel en démocratie», a résumé le ministre de la Justice, Arif Virani, à son arrivée à la réunion du cabinet.

D'ailleurs, il a fait référence au fait que pas plus loin qu'il y a tout juste deux ans, la Cour suprême a tranché que les peines consécutives - une mesure mise en place sous le gouvernement conservateur de Stephen Harper - sont inconstitutionnelles, y compris pour les pires meurtriers comme le tueur de la mosquée de Québec, puisque la Charte interdit «les traitements ou peines cruels et inusités».

M. Virani a soutenu qu'aucun gouvernement fédéral n'a invoqué cette clause et que «c'est une bonne chose». Selon lui, la disposition controversée devrait être utilisée comme «la dernière option, pas la première». Autrement dit, qu'un «dialogue» ait lieu entre les tribunaux et les gouvernements avant qu'elle ne soit invoquée.

Le lieutenant politique de Justin Trudeau pour le Québec, Pablo Rodriguez, a jugé «très inquiétants» les propos du chef du «parti le plus à droite de l'histoire du pays», d'autant plus qu'«on commence à connaître le personnage, on voit avec qui il s'associe, on voit qu'il est incapable de critiquer la droite radicale».

«Et on peut se demander à quoi ça servira, a-t-il poursuivi. Est-ce que, par exemple, il pourrait s'en servir pour interdire l'avortement ou toute mesure sociale qui est importante pour les Canadiens?»

Le ministre Rodriguez faisait référence au fait que le chef conservateur a contourné lundi une question posée dans l'enceinte de la Chambre des communes l'invitant explicitement à condamner «les partisans de la suprématie blanche, de l'anarchie et de la misogynie».

Pour le ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc, il est déplorable que M. Poilievre n'ait même «pas le courage de dire qu'il sera le premier gouvernement fédéral à invoquer la clause dérogatoire».

«Moi, je pense qu'on peut avoir des lois dans le domaine criminel qui sont robustes, qui protègent les gens, tout en respectant la Charte des droits et libertés», a-t-il ajouté.

Michel Saba, La Presse Canadienne