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La pression monte pour qu'Ottawa intervienne dans le conflit à Postes Canada

durée 22h04
6 décembre 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

Alors que la grève à Postes Canada dure depuis quatre semaines, les experts affirment que la pression sur le gouvernement pour qu'il agisse s'accroît, alors que les appels à l'intervention du milieu des affaires se font plus pressants.

Jusqu'à présent, Ottawa a expliqué qu'il n'interviendrait pas, malgré les nombreux conflits de travail qui ont récemment fait beaucoup parler d'eux. Toutefois, il lui est de plus en plus difficile de rester à l'écart, a affirmé Barry Eidlin, professeur agrégé de sociologie à l'Université McGill.

«La pression monte sur eux pour qu’ils mettent fin à la grève», a assuré M. Eidlin.

Le gouvernement est récemment intervenu dans des conflits majeurs dans les ports et les chemins de fer en ordonnant au Conseil canadien des relations industrielles d’ordonner un arbitrage exécutoire.

Mais M. Eidlin a expliqué qu’une différence clé avec ce conflit est que, même si la grève à Postes Canada est certainement au cœur des préoccupations de nombreux Canadiens, en particulier des propriétaires d’entreprise, elle n’est pas aussi dommageable économiquement que l’auraient été des arrêts prolongés dans les ports et les chemins de fer.

Au cours des décennies passées, une grève à Postes Canada aurait eu des conséquences beaucoup plus étendues, en particulier lorsque la plupart des gens recevaient leur salaire par chèque, a expliqué Ian Lee, professeur agrégé à la Sprott School of Business de l’Université Carleton.

«Dans les années 60 à 90, le service postal était absolument essentiel», a affirmé M. Lee, qui a étudié Postes Canada pendant plusieurs décennies et a déjà travaillé à la société d’État.

Ceux qui comptent sur lui, cependant, en sont « très, très dépendants », a-t-il ajouté.

Plus de 55 000 grévistes

Postes Canada et le syndicat représentant plus de 55 000 grévistes semblaient sur le point de reprendre les négociations vendredi, alors que la grève entrait dans sa quatrième semaine.

La médiation fédérale a été suspendue la semaine dernière en raison de l’éloignement excessif des parties. Cette semaine, le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes a déclaré avoir envoyé de nouvelles contre-propositions au médiateur dans l’espoir que les pourparlers puissent reprendre. Vendredi soir, le syndicat a indiqué avoir reçu une réponse de Postes Canada, qui a confirmé avoir envoyé de nouvelles propositions.

Les appels à l’intervention du gouvernement se multiplient de la part du milieu des affaires et des groupes comme le Conseil canadien du commerce de détail affirment que la grève nuit de plus en plus aux entreprises chaque jour.

L’intervention du gouvernement dans les conflits portuaires et ferroviaires a été controversée, et les syndicats impliqués dans ces conflits ont lancé des recours judiciaires après l’intervention du gouvernement.

Le gouvernement éprouve peut-être «des remords» à propos de son utilisation de cet outil, a lancé M. Eidlin, «et il ne veut donc pas simplement en faire le modèle par défaut». Lui et d’autres ont prévenu que l’utilisation de l’article 107 par Ottawa créait un précédent dangereux qui minait la négociation collective.

Une autre chose qui différencie cette grève des conflits portuaires et ferroviaires est que Postes Canada elle-même n’a pas répondu aux appels à l’intervention, a noté M. Eidlin. Dans les conflits ferroviaires et portuaires, les employeurs étaient parmi les parties qui ont demandé à Ottawa d’intervenir.

MM. Eidlin et Lee pensent que c’est parce que Postes Canada n’aime pas ses chances d’obtenir un arbitrage exécutoire.

«Je pense qu’ils estiment qu’il est peu probable qu’ils puissent obtenir un jugement favorable en arbitrage», a expliqué M. Eidlin, en particulier en ce qui concerne l’un des plus gros points de friction dans les négociations jusqu’à présent : la livraison le week-end.

Postes Canada a présenté la livraison la fin de semaine comme un moyen d’augmenter ses revenus et d’être plus compétitive. L'employeur dit vouloir doter les quarts de travail du week-end d’un mélange de nouveaux postes permanents à temps partiel et de certains postes à temps plein. Mais le syndicat a accusé Postes Canada d’essayer d’augmenter sa main-d’œuvre à temps partiel au lieu de créer de bons emplois à temps plein.

M. Eidlin considère que l'argument de Postes Canada en faveur de la livraison le week-end est une tentative de créer un deuxième niveau d'emploi inférieur, et il pense qu'il est peu probable qu'un arbitre l'accorde «étant donné l'effet corrosif que cela aurait sur la main-d'œuvre».

M. Lee a affirmé que la question est existentielle pour Postes Canada et le syndicat. La société d’État doit changer ou continuer à tourner en rond, mais le syndicat ne veut pas abandonner ses gains durement gagnés, a-t-il déclaré.

Une probable intervention du gouvernement

Au fil des ans, l’intervention du gouvernement dans les conflits de travail majeurs a été relativement courante, a souligné M. Eidlin, généralement par le biais d’une loi de retour au travail. C’est en partie pourquoi les chefs d’entreprise sont si prompts à la réclamer, a-t-il déclaré.

Mais il y a aussi de la pression sur Postes Canada et le syndicat, a-t-il indiqué — et cela semble fonctionner.

«Nous constatons un certain mouvement à la table des négociations, ce qui est exactement (…) la façon dont ces négociations sont censées fonctionner», a-t-il affirmé.

Si les deux parties parvenaient à un accord sans intervention, cela créerait un précédent nouveau et plus sain, a souligné M. Eidlin.

Mais M. Lee pense que le gouvernement pourrait bientôt intervenir si les deux parties ne se rapprochent pas.

«Ils vont probablement céder, car ils sont un gouvernement minoritaire et ils sont très bas dans les sondages», a-t-il expliqué.

Rosa Saba, La Presse Canadienne

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