L'apprentissage des échecs aide de jeunes Albertains à répéter leurs erreurs
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Par La Presse Canadienne, 2024
EDMONTON — Chaque vendredi, dans une salle de classe du sud de l'Alberta, des jeunes apprennent à faire échec et mat à leurs problèmes.
Penchés sur un échiquier à l'Université de Lethbridge, des adolescents et des jeunes adultes qui ont déjà été condamnés pour divers crimes apprennent à réfléchir, à réfléchir encore, à toujours réfléchir avant de déplacer leurs pièces.
Selon Lance Grigg, le fondateur de Chess for Life, ce programme aide ces jeunes à atteindre des objectifs à court terme, comme effectuer des travaux complémentaires, respecter un couvre-feu et rester à l'écart des problèmes.
Certains participants ont réussi à se trouver un emploi à temps plein, à s'inscrire à l'université ou à rétablir des relations rompues.
«Il existe plusieurs façons de réfléchir aux échecs qui vont au-delà de l'échiquier lui-même, explique M. Grigg, qui souhaite étendre le programme à toutes les prisons en Alberta.
«C'est une expérience qui transforme les gens de multiples façons.»
M. Grigg, qui enseigne aussi à la faculté d'Éducation de l'Université de Lethbridge, dit avoir eu l'idée de fonder Chess for Life en 2016.
À l'époque, le juge Derek Redman avait fait les manchettes en condamnant un garçon de 12 ans, reconnu coupable d'avoir menacé un autre jeune d'un couteau, à aller jouer au basket-ball au moins pendant cinq heures par semaine.
Mais comme le garçon n'avait pas de ballon, le juge a prescrit à un officier de la cour qu'il lui en procure un avant sa libération.
Peu de temps, M. Grigg a rencontré le juge dans un gymnase et l'a convaincu de considérer de condamner des jeunes contrevenants à jouer aux échecs.
En 2018, le ministère de la Justice de l'Alberta a autorisé une demande de M. Grigg et du juge Redman afin que Chess for Life devienne un outil de référence pour les agents de probation de jeune condamné à des travaux de services communautaires.
Des bénévoles du programme se rendent au Centre correctionnel de Lethbridge et au Centre pour jeunes contrevenants d'Edmonton pour apprendre à des détenus l'art des échecs. D'autres prisons ont demandé des renseignements à ce sujet, mentionne M. Grigg.
Soixante-quinze nouveaux adeptes des échecs ont terminé la formation.
«Les échecs m'aident à gérer des situations de conflit», lance un jeune participant qu'on ne peut pas identifier en vertu de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Pour un autre, la salle d'échec est l'endroit où les problèmes s'évaporent pendant une heure. «Cela m'aide à comprendre des jeunes qui peuvent eux aussi me comprendre», explique-t-il.
M. Grigg dit que le programme est actuellement financé par lui-même et d'autres contributeurs. Il espère que le ministère de la Justice de l'Alberta fera bientôt sa part.
Un porte-parole du ministère a refusé de commenter le programme à cause d'une élection partielle qui se déroulera le 18 décembre dans la circonscription provinciale de Lethbridge-West.
Un des trucs que les jeunes apprennent également, c'est la gestion du temps. Après tout, une partie d'échecs ne dure pas toujours, ni la vie d'ailleurs.
M. Grigg ajoute que l'utilisation stratégique des cases sur l'échiquier peut apporter d'importantes leçons.
«Aux échecs, on ne peut pas revenir en arrière, même si on aimerait le faire parfois. On discute des façons de bien utiliser son espace, que cela soit dans une salle, un bureau, une auto et même sa tête.»
Fakiha Baig, La Presse Canadienne