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Janette Bertrand assiste avec émotion au dévoilement d'une murale lui rendant hommage

durée 17h11
26 septembre 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — La pluie de l’avant-midi avait cessé en début d’après-midi et le soleil s’est mis à briller comme pour rendre, lui aussi, hommage à Janette Bertrand, venue assister jeudi au dévoilement d’une murale à son image réalisée par le céramiste Laurent Gascon dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve qui l’a vu naître.

Jeune de 99 printemps, la grande dame des médias québécois se dit honorée des hommages qui s’accumulent. «C’est sûr que ça fait plaisir!» s’exclame-t-elle en prenant bien soin d’ajouter du même souffle: «Mais ça ne m’enfle pas la tête».

«Admettons que j'ai semé et que là je suis à l'âge où je récolte. Il n’y en a jamais trop de récolte. Ça compense pour les années où j'ai été méprisée, où on m'appelait Janette la cochonne parce que j'avais un courrier du cœur qui disait les vraies choses. Ben là, je suis contente de voir que quelqu'un m'aime. Je suis contente de savoir qu’ils m'aiment.»

«Une espèce de pédagogue populaire»

Bien qu’on la désigne comme journaliste, comédienne et écrivaine, quand on lui demande comment elle se définit, elle répond plutôt «moi, je suis une espèce de pédagogue populaire. J'enseigne aux gens, J'ai toujours fait ça et maintenant, je n'ai pas peur de le dire. Avant j'aurais dit "ben non, je n'enseigne pas", mais je pense qu'à 100 ans – 99 oui – je peux dire que oui, je suis quelqu'un qui veut améliorer le sort des gens. Parce que j'ai amélioré le mien, je sais comment ça marche, il y a moyen de s'améliorer.»

Bien qu’elle soit reconnue comme une des féministes québécoises de la première heure, elle se garde bien de limiter son influence aux femmes. «Les hommes, ils voient les femmes changer. Donc ça les change aussi. Ils sont obligés de changer s'ils veulent avoir des blondes. Il va falloir qu'ils changent, n'est-ce pas? En ce moment, en ce moment, le changement est en train de se faire», assure-t-elle en prenant pour exemple ses petits-fils de 50 et 45 ans qui s’occupent de leurs enfants, «ce que nos maris ne faisaient pas, jamais, avant. Les hommes, ne s'occupaient pas des enfants, c'était le rôle des femmes, c'était normal.»

Un modèle de vieillissement

Et pourtant, elle ne voit pas son rôle d’éducatrice féministe comme le plus important héritage qu’elle léguera. Plutôt, elle estime avoir réussi, du haut de son quasi-centenaire, à «montrer aux gens qu'on peut vieillir et rester en forme – pas physiquement – mais rester actif, c'est ça que je vais laisser aux gens.»

C’est en abordant cette question que la nonagénaire, déjà très allumée, s’enflamme. «Tu sais pourquoi je suis si populaire en ce moment? C'est parce qu'il y a eu la pandémie, quand on a montré les vieux comme des rien du tout, des objets à jeter. On était des bons à rien, des sert à rien. C'est pour ça que les gens m’aiment tant: ils se disent qu’on peut devenir comme elle facilement, il y a juste à se tenir occupé.»

En s’adressant à la petite foule venue assister au dévoilement de la murale, elle a fait part de son attachement à son quartier d’origine. «Je n'ai jamais oublié et c'est ce qui a fait mon succès, d'où je venais. Je n'ai jamais oublié le vrai monde, le monde que j'ai côtoyé dans le magasin de mon père.»

«Ce quartier-là, je l'ai dans mon ADN et si je l'ai quitté, j'y suis toujours revenue. Notre quartier d’enfance nous reste tout le temps et plus tu vieillis, plus tu fais des liens avec ton enfance.»

«Je pense que je vais me trouver belle!»

Elle a remercié tout le monde, soulignant que «la popularité, c'est vous autres qui me l’a donnée. C'est le public qui dit: "elle, je l'aime ou lui je l'aime, puis on va en faire une vedette". C'est le public, c'est votre responsabilité. Merci à tous les gens qui me suivent depuis toujours et qui font que je suis devenue un espèce de modèle à suivre parce que je suis encore active.»

«Je ne fais pas ça pour vous autres, là, je fais ça pour moi. Savez-vous, me reposer ça me fatigue», a-t-elle déclaré dans l’hilarité générale.

Puis, observant sa murale, elle a dit que «c'est difficile pour moi de me regarder. Vous êtes-vous déjà regardés dans une photo? On n’est jamais belle. Mais je vais me regarder de loin tout à l'heure en partant et je pense que je vais me trouver belle», une affirmation que personne ne pourrait contredire.

Pierre Saint-Arnaud, La Presse Canadienne