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C.-B.: un jury entend des détails sinistres sur le décès d'une femme morte de faim

durée 20h21
13 janvier 2025
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

BURNABY — Florence Girard était si petite à sa mort qu'elle «ressemblait à une enfant» dans son cercueil, a déclaré sa sœur lors d'une enquête du coroner de la Colombie-Britannique sur le décès de la femme.

Sharon Bursey a déclaré au jury d'enquête à Burnaby, en Colombie-Britannique, lundi, qu'elle était prête à quitter son emploi pour s'occuper de Mme Girard — qui avait besoin de soins 24 heures sur 24 — si elle avait su la gravité de l'état de sa sœur et si la province lui avait fourni un soutien supplémentaire.

«J'ai adoré l'avoir pendant mes vacances», a raconté Mme Bursey, qui s'arrêtait fréquemment et fondait parfois en larmes pendant son témoignage.

«Elle fait partie de ma famille. Mes enfants ont grandi avec elle. Elle aimait les chatouiller, mais elle leur faisait mal parce qu'elle avait de si petits doigts pointus. Son rire était le meilleur.»

«Je suis désemparée, a-t-elle déclaré. J'ai son urne à côté de mon lit, parce que je ne peux pas l'enterrer.»

Mme Bursey a également fait placer une partie des cendres de sa sœur dans un pendentif qu'elle porte en collier.

Florence Girard est décédée en 2018, ne pesant qu'environ 50 livres, et Astrid Dahl, qui s'occupait d'elle dans le cadre d'un programme pour les personnes ayant une déficience intellectuelle, a été reconnue coupable en 2022 de ne pas avoir fourni les éléments nécessaires à la vie dans cette affaire.

L'enquête vise à formuler des recommandations pour le système de soins de la Colombie-Britannique afin d'éviter que des décès similaires ne se reproduisent à l'avenir.

Mme Bursey a été la première à témoigner lors de l'enquête et portait avec elle une photo de sa famille avec Mme Girard assise au milieu.

Elle a indiqué que la société d'État provinciale Community Living BC n'avait pas offert d'aide financière pour aider Florence Girard à rester avec sa famille.

Cela signifiait que Mme Girard devait vivre dans la maison de Dahl, qui était supervisée par la Kinsight Community Society, qui avait été engagée par Community Living BC.

Mme Bursey a déclaré à l'enquête que Dahl n'avait pas répondu à ses appels ou avait dit qu'elle rappellerait lorsqu'elle voulait avoir des nouvelles sa sœur avant sa mort en 2018.

Elle a ajouté que Florence Girard était gardée dans une chambre à coucher de la maison qui était bloquée par une barrière pour bébé, avec un matelas sur le sol et le film «Titanic» diffusé en arrière-plan à tout moment.

«C'est comme si elle avait été jetée dans le trou de la prison (…) où ils vous laissent mourir de faim et devenir fou parce que vous ne voyez pas les gens, vous ne faites que regarder les murs 24 heures sur 24, sept jours sur sept», a expliqué Sharon Bursey.

«Les quatre dernières années de sa vie ont été horribles», a-t-elle déclaré à l'enquête. «Je n'arrive tout simplement pas à croire que cela se produise au Canada.»

Une dernière visite médicale en 2014

La Dre Juliyana Romey, qui a pris la relève en tant que médecin de famille de Florence Girard de 2013 jusqu'au moment de sa mort, a déclaré à l'enquête qu'elle avait vu Mme Girard pour la dernière fois en 2014, et que la femme avait «généralement l'air bien» avec une température corporelle, une tension artérielle et une respiration normales.

La Dre Romey a cependant noté que Dahl n'avait pas amené Mme Girard pour une autre visite.

«C'est très inhabituel», a-t-elle affirmé. «Comme elle était toujours une patiente du cabinet, il arrive que des patients déménagent et que nous n'ayons plus de nouvelles d'eux, mais de toute évidence, elle n'avait pas déménagé.»

La Dre Romey a témoigné que ses dossiers ne montraient pas que Florence Girard avait été emmenée aux urgences à un moment quelconque entre 2014 et 2018, ce dont un médecin de famille aurait été informé.

Elle a expliqué que les médecins de famille n'ont pas de procédures en place pour rappeler proactivement les patients à moins qu'il n'y ait une circonstance inhabituelle comme des analyses sanguines anormales ou d'autres résultats.

«À part cela, il incombe au patient ou au soignant d'initier le contact avec nous, de s'engager avec nous», a indiqué la Dre Romey.

«Pour les 15 dernières années, j'ai (eu) un membre de la famille handicapé vivant avec moi dans mon foyer, et je peux confirmer que c'est la responsabilité du soignant d'initier le contact avec les médecins, les dentistes, les optométristes ou toute autre personne dont il aurait besoin de soins.»

Elle a déclaré qu'elle a ensuite entendu parler de Mme Girard, lorsque le BC Coroners Service lui a envoyé une note concernant le décès.

Mme Bursey, qui a dit à plusieurs reprises que le processus de prise en charge devait être modifié afin d'éviter des tragédies similaires, a expliqué au jury qu'elle craignait qu'une telle situation ne se reproduise.

«Le nombre de cas où des personnes m'ont contactée est écœurant», a-t-elle déclaré.

«Elle mérite tellement mieux», a ajouté Mme Bursey à propos de sa sœur.

L'enquête est prévue pour huit jours.

Chuck Chiang, La Presse Canadienne

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