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Deux autres poursuites pour des agressions sexuelles à la police de Terre-Neuve

durée 17h24
2 mai 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

SAINT-JEAN, T.-N.-L. — Deux autres femmes ont intenté des poursuites alléguant qu'elles avaient été agressées sexuellement par un membre en service de la police provinciale de Terre-Neuve-et-Labrador (RNC) qui leur avait proposé de les raccompagner chez elles après une soirée où il y avait eu une forte consommation d'alcool.

L'avocate Lynn Moore a déposé les déclarations auprès de la Cour suprême de la province fin mars au nom des deux femmes, ce qui porte à quatre le nombre total de poursuites civiles portant sur des allégations d'inconduite sexuelle de la part de membres de la RNC. Dix femmes, dont une membre de la police, sont à l'origine de ces poursuites et leurs noms sont protégés par une interdiction de publication.

Mme Moore a affirmé en entrevue que ces femmes souhaitent contrer la violence sexuelle et obtenir une reconnaissance qu'il y a eu des comportements inacceptables et qu'elles n'en sont pas responsables.

Aucune accusation criminelle n'a été portée en lien avec ces allégations. Les femmes ont choisi de porter plainte au civil plutôt que de porter plainte au pénal parce qu'elles ont peu confiance dans le système de justice pénale, a déclaré Mme Moore.

Les dernières poursuites déposées le 28 mars et modifiées le 29 avril allèguent que les femmes étaient visiblement en état d'ébriété lorsque le sergent de la «Royal Newfoundland Constabulary», Robert Baldwin, qui a depuis pris sa retraite, a proposé de les reconduire chez elles dans sa voiture de police identifiée à Saint-Jean, Terre-Neuve.

Leurs affirmations dans la poursuite n'ont pas été mises à l'épreuve devant les tribunaux et les messages laissés par La Presse Canadienne à M. Baldwin sont restés sans réponse.

Mme Moore a déposé deux autres poursuites civiles en 2022 dans lesquelles huit femmes, dont une policière de la RNC, allèguent avoir été agressées sexuellement ou violées par des membres du corps policier. Trois de ces femmes, dont la policière, ont affirmé que M. Baldwin était leur agresseur.

Une avocate représentant M. Baldwin dans le cadre de ces réclamations a indiqué que ses services n'avaient pas été retenus dans les derniers dossiers, mais en réponse aux poursuites précédentes, M. Baldwin avait catégoriquement nié toutes les allégations.

Selon une déclaration déposée en mars, M. Baldwin aurait conduit la plaignante dans un secteur isolé en 2012 et l'aurait forcée à avoir des relations de sexe oral et de pénétration.

Il aurait obtenu son numéro de téléphone et l'aurait appelée une semaine plus tard, alors qu'elle était en train de boire et de socialiser dans un bar de la région de Saint-Jean, indique le document. Il lui aurait proposé de la raccompagner chez elle, l'aurait de nouveau conduite dans un endroit isolé et l'aurait forcée à avoir des relations sexuelles avec lui.

Dans la deuxième déclaration, une femme affirme qu'elle était en état d'ébriété lorsque M. Baldwin l'a reconduite chez elle en 2014, puis l'a suivie jusqu'à la porte d'entrée, «sous prétexte de l'aider». Il est entré chez elle et l'a agressée sexuellement, affirme le document, ajoutant : «Aucun consentement n'a été obtenu et la plaignante n'était pas en mesure de consentir.»

La poursuite allègue que M. Baldwin a blessé la femme ; elle souffrait «grandement» et saignait abondamment le lendemain, soutient-on.

Il a obtenu son numéro de téléphone lors de cet épisode et l'a contactée «peu de temps après», indique la déclaration, ajoutant : «Elle n'a pas donné suite à cette proposition.»

Le gouvernement aurait dû savoir

Le gouvernement provincial est désigné comme seul défendeur dans les deux poursuites, en tant qu'organisme responsable de la RNC. La RNC partage les tâches policières dans la province avec la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

Les poursuites allèguent que la RNC savait que M. Baldwin se trouvait fréquemment au centre-ville de Saint-Jean, à l'extérieur de la zone à laquelle il était affecté, et que le corps policier n'a rien fait pour enquêter, le discipliner ou le contrôler.

Le gouvernement savait, ou aurait dû savoir que des membres du corps policier «recherchaient des femmes à des fins sexuelles pendant qu'ils étaient en service et n'a pris aucune mesure pour empêcher cette pratique», affirment les deux poursuites. «En outre, ayant connaissance de l'inconduite sexuelle de ses agents, le défendeur avait le devoir d'avertir le public de ce danger et ne l'a pas fait.»

La RNC et le ministère provincial de la Justice ont déclaré mercredi dans des courriels qu'ils ne pouvaient pas commenter une affaire portée devant les tribunaux.

«Toutes les plaintes concernant la mauvaise conduite d'agents et les allégations criminelles sont prises très au sérieux, a déclaré le porte-parole de la RCN, James Cadigan. La RNC exige que ses policiers respectent les normes les plus élevées.»

Les poursuites soutiennent que les agressions présumées ont eu des impacts importants sur la santé mentale et physique des femmes. Elles ont eu des difficultés à établir et à entretenir des relations, et elles sont en proie à des souvenirs et à des pensées persistantes sur ce qui leur est arrivé, affirme-t-on. L'une d’elles a lutté contre la toxicomanie.

Mme Moore a déclaré que la condamnation pour agression sexuelle en 2021 de l'agent de la RNC Carl Douglas Snelgrove avait motivé certaines des femmes à l'origine des quatre poursuites en cours à se manifester.

Sarah Smellie, La Presse Canadienne